Objectif 2016

Publié le 31 août 2014 - Bruno Colombari

PNG - 21.7 kioJeudi 4 septembre s’ouvre pour les Bleus un cycle de vingt mois sans compétition, pendant lequel ils vont préparer l’échéance de l’Euro 2016. Etat des lieux, forces en présence et pièges à éviter.

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Dix matches au statut inédit

Avant, c’était simple. Il y avait deux sortes de matches : les amicaux, et ceux en compétition. Certes, à quelques exceptions près : en août 1985 par exemple, les Bleus avaient joué contre l’Uruguay pour une coupe intercontinentale purement honorifique. Et en 2001 et 2003, ils avaient remporté deux coupes des Confédérations avec des équipes mixtes, pour ne pas dire des sélections C.

Mais désormais, il va y avoir des matches amicaux insérés dans une poule qualificative. On a déjà dit ici ce qu’on pensait de cette idée de Michel Platini, dont les mauvaises langues diront qu’il y a pensé parce que l’équipe de France était concernée. Les Bleus ont donc été versés dans un groupe de cinq dont ils forment la sixième équipe, et les dix matches qu’ils disputeront ne seront crédités d’aucun point. Un flou artistique concernant le nombre de remplaçants autorisés (trois pour un match de compétition, six pour un amical), les suspensions éventuelles pour accumulation de cartons et l’attribution de points pour l’indice UEFA a longtemps traîné, preuve du caractère improvisé de la décision platinienne. Reste à savoir dans quel état d’esprit les cinq équipes du groupe I aborderont les matches face aux Français. Et on peut déjà tabler sur le fait que les clubs pourvoyeurs d’internationaux traîneront les pieds pour mettre leurs joueurs à disposition de l’équipe nationale.

Quels adversaires ?

Avant le tirage au sort des phases qualificatives, on pouvait craindre un groupe aux allures de purge qui n’aurait donné (sur le papier) que des matches amicaux sans saveur. Imaginez un groupe avec la Grèce, la Hongrie, la Roumanie, la Finlande et l’Irlande du Nord. Il existe, c’est le groupe F. A côté, celui dont les Bleus ont hérité est presque sexy : Portugal, Danemark, Serbie, Arménie et Albanie. Les deux premiers sont évidemment candidats à la phase finale en 2016, et la Serbie peut espérer participer aux barrages.

Outre ces dix matches, l’équipe de France jouera bien sûr de vraies rencontres amicales contre des adversaires qu’elle aura choisis. Outre l’Espagne (choix un peu surprenant compte tenu des trois confrontations depuis juin 2012), la FFF a annoncé récemment un match contre l’Italie en juin 2015 (probablement en France puisque le précédent de novembre 2012 avait eu lieu à Parme) et évoqué des rencontres contre l’Allemagne, la Colombie et l’Angleterre, sans plus de précisions.

Avec quels joueurs ?

La première liste post-mondial de Didier Deschamps a été d’un clacissisme parfait : le sélectionneur a rappelé les mêmes qu’au Brésil, moins Landreau (fin de carrière) et Giroud (blessé), auxquels se sont ajoutés Mandanda et Lacazette. Le gardien de l’OM, on s’en souvient, avait déclaré forfait en mai après avoir été appelé dans les 23, et l’attaquant lyonnais faisait partie des réservistes. Moins original que ça, c’est difficile.

Il n’empêche qu’il y aura forcément des changements d’ici l’Euro au gré des blessures, des fluctuations de forme et de l’émergence éventuelle de nouveaux talents. Au vu de ce qui s’est passé pour les trois précédentes périodes sans compétition (Lire notre série Les années pour des prunes 1982-84, 1996-98 et 2000-02), on peut essayer d’extrapoler qui fera partie de la quarantaine de joueurs utilisés dans les vingt mois à venir. Et ce en les triant en trois catégories : ceux qui étaient à la coupe du monde, ceux qui n’y étaient pas mais qui ont déjà été sélectionnés et les nouveaux.

Cette dernière catégorie est évidemment la plus spéculative. Il est probable qu’elle comportera le plus grand nombre d’erreurs (mais c’est le jeu). C’est aussi la moins fournie, compte tenu du nombre très élevé de nouveaux joueurs lancés depuis 2010 par Laurent Blanc et Didier Deschamps : 21 pour le premier, 16 pour le second. Soit 37 essais en quatre ans et 54 matches. Sur une durée comparable, Aimé Jacquet en avait fait 33 (sur 53 rencontres), Henri Michel 26 (36 matches), Roger Lemerre 23 (53 matches) et Michel Platini 18 (sur 29 matches seulement).

On peut donc en conclure qu’avec une équipe profondément renouvelée et considérablement rajeunie, Deschamps s’attachera d’abord à donner de l’expérience à ses joueurs plutôt qu’à en chercher de nouveaux.

La deuxième catégorie, celle des joueurs confirmés qui n’étaient pas au Brésil, est un bric-à-brac où se croisent des Bleus en fin de carrière (Evra et Mavuba), des jeunes qui n’ont pas eu le temps de se faire une place (Grenier, Guilavogui, Kondogbia, Lacazette) et ceux qui oscillent entre le statut de remplaçants et celui de troisième choix (Payet, Mandanda, Mathieu, Gignac, Gonalons, Trémoulinas...). Loïc Perrin aurait pu se trouver dans cette catégorie, mais il ne compte aucune sélection. Ces douze-là devront cravacher pour être dans la liste de l’Euro. A eux de faire fructifier leur expérience par rapport aux nouveaux.

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Un Euro au format XXL

Si la proposition Platini d’intégrer le pays organisateur à la phase qualificative était de bon sens, celle de passer la phase finale du tournoi de seize ) vingt-quatre équipes n’a pas vraiment de justification. Sinon bien sûr de multiplier le nombre de matches (47 contre 31 précédemment) et le montant des droits télé [1].

Ce format est en effet remarquablement bancal : on part avec 24 équipes pour en arriver à 16 avec des huitièmes de finale. Ce qui veut dire en clair qu’il faudra une quinzaine de jours et 36 matches pour éliminer seulement huit sélections. Et que outre les six premiers et les six deuxièmes, les quatre meilleurs troisièmes passeront aussi. Inédite à l’Euro, cette configuration a été utilisée lors de trois mondiaux (Mexique 1986, Italie 1990 et Etats-Unis 1994). Une autre version avait été testée en 1982, avec un second tour à quatre groupes de trois.

Quelles têtes de série ?

Si on suppose que la hiérarchie actuelle sera respectée et que le classement Fifa ne bougera pas trop d’ici vingt mois (ce qui est peu probable), les six têtes de séries à l’Euro pourraient être l’Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique, l’Espagne, la Suisse et la France. Les favoris devraient être parmi ceux-là, avec l’Italie, l’Angleterre et le Portugal comme outsiders, la Suisse semblant toutefois surcotée. N’oublions pas que si la coupe du monde est remarquablement conservatrice (huit vainqueurs parmi douze finalistes en vingt éditions), l’Euro est beaucoup plus ouvert : neuf vainqueurs parmi douze finalistes en quatorze tournois. Une nouvelle surprise du type de la Croatie n’est pas à exclure.

Jouer à domicile : cinq précédents déjà

Inventeurs des principales compétitions internationales (la coupe du monde s’est longtemps appelée Jules-Rimet et le trophée de l’Euro porte le nom d’Henri Delaunay), les Français vont en organiser une pour la sixième fois (en comptant la coupe des Confédérations 2003). En 1938, ils acccueillaient la troisième coupe du monde de l’histoire, remportée par l’Italie, tenante du titre. En 1960, qualifiée pour les demi-finales de la première coupe d’Europe des Nations, la France prenait en charge les quatre derniers matches de la compétition (demi-finales, match de classement et finale) remportée par l’URSS.

En 1984, alors que l’Euro est devenu quatre ans plus tôt un tournoi à huit, la France ajoute des demi-finales (en Italie en 1980, la finale opposait les premiers des deux groupes) et en profite pour remporter le tournoi. En 1998, la compétition mondiale passe à 32 et les Bleus se mettent sur leur 31 avec un 3-0. En 2003, l’organisation de la coupe des Confédérations est confiée au tenant du titre, et les Bleus gardent leur trophée malgré le décès de Marc-Vivien Foé en demi-finale lors du match Cameroun-Colombie à Lyon. Enfin, en 2016 aura lieu le premier Euro à 24 participants. On notera au passage que les Bleus ont gagné trois fois sur cinq à domicile, ce qui devient de plus en plus rare pour un pays organisateur : hormis la France, le dernier à l’avoir fait en coupe du monde est l’Argentine en 1978. Depuis que l’Euro est un tournoi avec une vraie phase finale, aucun autre pays ne s’est imposé chez lui. Seule la coupe des Confédérations est bienveillante avec ceux qui l’accueillent : le Mexique en 1999 et le Brésil en 2013 l’ont remportée devant leur public.

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