Philippe Mahut, neuf promesses envolées

Publié le 19 avril 2021 - Richard Coudrais

Philippe Mahut a connu neuf sélections en équipe de France entre 1981 et 1983. Même s’il fut appelé dans le groupe pour la Coupe du monde 1982, il ne s’est jamais imposé chez les Bleus. Il est décédé en 2014 à l’âge de 57 ans.

5 minutes de lecture

Sa tignasse blonde le rendait reconnaissable entre tous dans chacune des équipes où il a évolué. Philippe Mahut était un de ses stoppeurs accrocheurs qui éteignait les avant-centres du championnat de France sans se départir d’un fair-play reconnu de tous. Il était également doté d’un très bon jeu de tête. Formé à Fontainebleau, alors en deuxième division, il découvre l’élite à vingt-deux ans au FC Metz. Il connaîtra ensuite neuf sélections en équipe de France.

Un ballon perdu à Bruxelles

Philippe Mahut est arrivé en équipe de France en septembre 1981 à l’occasion d’un match éliminatoire de la Coupe du monde 1982 disputé à Bruxelles face à la Belgique. Le sélectionneur Michel Hidalgo est alors en recherche de certitudes. Il n’a aucune équipe-type et seuls trois joueurs sont d’incontestables titulaires, Marius Trésor, Maxime Bossis et Michel Platini. Et encore ce dernier n’est-il pas fixé sur le poste qu’il doit occuper, entre avant-centre ou meneur de jeu.

En défense centrale, Christian Lopez a les faveurs du sélectionneur pour être associé à Marius Trésor. Mais quand ce dernier est absent, il faut trouver un autre défenseur central. Léonard Specht a souvent fait l’affaire, mais une récente contre-performance contre Stuttgart à fait réfléchir le sélectionneur. Pour le match de Bruxelles, celui-ci donne sa chance à Philippe Mahut, alors âgé de 25 ans.

On a connu de meilleures conditions pour débuter une carrière internationale. Associé à Christian Lopez, le Messin est fébrile, comme le reste de l’équipe toute de blanc vêtue ce soir-là. A la 24e minute, il perd un ballon au milieu de terrain que les Belges exploitent au mieux pour ouvrir le score. Les Français s’inclinent 2-0 et voient s’éloigner la Coupe du monde espagnole.

Contre son camp, d’entrée

Mahut est rappelé un mois plus tard pour un autre match décisif à Dublin face à l’Irlande. Après trois minutes de jeu, il cherche à s’interposer face à Frank Stapleton mais marque contre son camp. La France égalise rapidement, par le jeune Bruno Bellone, mais les Irlandais reprennent le dessus en marquant par Stapleton puis Robinson qui profitent de la fébrilité de la défense française. La France s’incline 3-2, et le sort de Philippe Mahut semble déjà réglé.

Les Tricolores obtiennent leur qualification sans lui face aux Pays-Bas puis contre Chypre. C’est sans lui également qu’ils brillent en matchs de préparation contre l’Italie et l’Irlande du Nord. Contre le Pérou, Michel Hidalgo ose une charnière centrale inédite en rappelant Léonard Specht et Dominique Bathenay, l’un n’ayant plus été rappelé depuis un an, l’autre depuis deux ans…

Puis arrive un France-Bulgarie disputé à Toulouse le 15 mai 1982, c’est-à-dire la veille de la finale de la Coupe de France Saint-Etienne-Paris-Saint-Germain. Michel Hidalgo doit se passer des joueurs stéphanois et parisiens, dont Christian Lopez. Il aurait pu rappeler Léonard Specht, mais il avoue une préférence pour Philippe Mahut, auteur d’une grande saison à Metz. Absent depuis huit mois (hormis un match avec l’équipe de France B contre le Luxembourg...), celui-ci est associé à Marius Trésor et fait un très bon match… ce qui est une bonne idée quand le sélectionneur doit clôturer sa liste des 22 le soir-même.

C’est ainsi que Philippe Mahut gagne son ticket pour l’Espagne. Il entre également en jeu pour l’ultime rencontre de préparation face au Pays de Galles (0-1). Mais il est conscient de n’être aux yeux du sélectionneur qu’un remplaçant. En effet, à Bilbao contre l’Angleterre, Michel Hidalgo fait confiance à sa paire Trésor-Lopez. Mais celle-ci passe complètement au travers. Le sélectionneur fait alors savoir pour le prochain match qu’il a de profondes envies de changements. Philippe Mahut se tient prêt. Mais à l’entraînement, il est victime d’une légère blessure où il s’ouvre l’arcade sourcilière suite à un choc. Michel Hidalgo fera finalement appel à Gérard Janvion pour seconder Marius Trésor.

Troisième place à Alicante

La chance de Mahut est passée. Il ne joue du mondial 1982 que le dernier match, celui de la troisième place contre la Pologne, celui qui ne compte plus, celui où le sélectionneur fait jouer ses remplaçants. A Séville, deux jours plus tôt, Philippe Mahut avait accompagné Patrick Battiston à l’hôpital, se chargeant de rassurer la famille au téléphone. Contre la Pologne, le défenseur messin trouve face à lui une vieille connaissance, Andrej Szarmach, l’attaquant polonais d’Auxerre, lequel marque d’ailleurs un but. Victoire 3-2 des Polonais. Un moment inoubliable pour Philippe Mahut qui tente de chiper le ballon du match en rentrant aux vestiaires, avant de se faire aimablement rappeler à l’ordre par l’arbitre.

Au lendemain du Mondial espagnol, Philippe Mahut rejoint l’AS Saint-Etienne en même temps que Bernard Genghini et Alain Moizan. Alors que d’autres clubs lui avaient fait des propositions équivalentes, l’ancien messin se mord un peu les doigts. Il est tombé dans un club en pleine crise juridico-financière, l’une des plus importantes de l’histoire du football français

Cela ne l’empêche pas d’être appelé par Michel Hidalgo pour les matchs amicaux de la saison 1982/1983 et donc d’espérer jouer l’Euro 1984. Gérard Janvion et Christian Lopez ont en effet été mis en retraite internationale au terme du mondial espagnol et Philippe Mahut est prêt à prendre le relais. Il entre à la mi-temps du catastrophique match UNFP contre la Pologne (défaite 0-4), puis il est associé à Marius Trésor le mois suivant contre la Hongrie. La France s’impose 1-0 sur un but de Laurent Roussey. Philippe Mahut, pour sa septième sélection, découvre enfin la victoire chez les Bleus.

La chance passe

Au début de l’année 1983, Marius Trésor est aux prises avec de récurrentes blessures. Michel Hidalgo place Maxime Bossis en libéro (poste qu’il occupe dans son club depuis le début de la saison) et lui associe Philippe Mahut. La relation entre les deux hommes fonctionne très bien contre le Portugal (victoire 3-0 à Guimaraes) mais connaît quelques grippages un mois plus tard face à l’URSS au Parc des Princes (1-1). Mahut éprouve les pires difficultés devant les rapides attaquants soviétiques. Lors du match suivant contre la Yougoslavie, Michel Hidalgo fait appel au Brestois Yvon Le Roux. Celui-ci marque un but et fait un match satisfaisant. On ne le sait pas encore, mais la carrière de Philippe Mahut en équipe de France a pris fin. Son nom restera parfois évoqué comme solution de recours pour l’Euro 1984. En vain, d’autant que d’autres joueurs comme Jean-François Domergue intègrent la sélection.

Philippe Mahut avait rejoint l’AS Saint-Etienne en espérant jouer régulièrement au plus haut niveau. Mais le club forézien miné de l’intérieur ne joue plus que le maintien et ne peut éviter la relégation. Philippe Mahut rejoint l’ambitieux Racing Club de Paris en 1984, mais le club retombe en deuxième division. Mahut est rejoint par Maxime Bossis et les deux hommes reforment l’éphémère charnière centrale de l’équipe de France de début 1983. Le club bâti par la firme Matra retrouve l’élite, mais ne parvient pas vraiment à décoller.

Il aura donc manqué à Philippe Mahut de jouer dans un club du haut du tableau. Avec Metz, Saint-Etienne et le Racing, il n’a fait que lutter dans les deuxièmes parties de tableau. Après un passage à Quimper, Philippe Mahut termine sa carrière au Havre qu’il aide à faire monter en première division.

On le retrouve ensuite à Fontainebleau où il s’est installé. Il préside pendant quelques temps le club local avant de se lancer dans les assurances, puis goûter un peu à la politique. En 2005, il est nommé adjoint aux sports à la ville de Fontainebleau au côté du maire Frédéric Valletoux. C’est à lui que l’on doit le retour de la Foulée Impériale, une course très populaire. Il est décédé le 7 février 2014 d’un cancer à l’âge de 58 ans. Il est le premier disparu des 22 de la Coupe du monde espagnole. Un stade de rugby à Fontainebleau porte aujourd’hui son nom.

Neuf sélections, deux victoires, quatrième de la Coupe du monde

En neuf rencontres en Bleu, Philippe Mahut a disputé trois matchs de Coupe du monde dont un en phase finale. Il a connu en tout deux victoires, deux matchs nuls et cinq défaites. Il n’a marqué aucun but (sinon un contre son camp).

Sel.GenreDateLieuAdversaireScoreTps jeu
1 qCM 09/09/1981 Bruxelles Belgique 0-2 90
2 qCM 14/10/1981 Dublin Rep. d’Irlande 2-3 69*
. France B 27/04/1982 Esch-sur-Alzette Luxembourg 1-0 90
3 Amical 14/05/1982 Lyon Bulgarie 0-0 90
4 Amical 02/06/1982 Toulouse Galles 0-1 45
5 CM 3pl 10/07/1982 Alicante* Pologne 2-3 90
6 Amical 31/08/1982 Paris (Parc) Pologne 0-4 45
7 Amical 06/10/1982 Paris (Parc) Hongrie 1-0 90
8 Amical 16/02/1983 Guimaraes Portugal 3-0 90
9 Amical 23/03/1983 Paris (Parc) URSS 1-1 78*

pour finir...

Sources : les sites selectiona.free.fr, L’Équipe, Wikipédia, FFF + l’ouvrage « L’intégrale de l’équipe de France de football » (First édition) de Pierre Cazal, Jean-Michel Cazal et Michel Oreggia.

Mots-clés

Vous êtes plusieurs milliers chaque jour à venir sur Chroniques bleues. Nous vous en sommes reconnaissants et nous aimerions en savoir plus sur vous. Avec, en cadeau, trois articles inédits au format pdf à télécharger !

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?
Ajoutez votre commentaire ici

Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Vos articles inédits