Guy Van Sam, une enfance libanaise

Publié le 15 février 2024 - Pierre Cazal - 1

Né à Beyrouth d’une mère libanaise et d’un père cambodgien, Guy Van Sam a été formé à Montpellier avant de jouer pour le RC Paris et d’être appelé trois fois en sélection en 1961, sans succès. Il est mort le 8 février 2024 à 88 ans.

4 minutes de lecture

Guy Van Sam est né le 20 décembre 1935 à Beyrouth au Liban, d’une mère libanaise, liée à l’influente famille des Mouawad, et d’un père cambodgien, Tran Van Sam. Il n’était pas le premier Bleu d’origine asiatique : Albert Polge, né au Vietnam d’une mère vietnamienne et d’un père français, l’avait précédé ; par contre il était le premier à avoir été naturalisé, car aucun de ses parents n’avait la nationalité française à sa naissance. Consul de France à Beyrouth, son père avait rejoint les Forces Françaises Libres qui prirent le contrôle du Liban en 1941 et devint le secrétaire général de leur état-major. C’est à ce titre qu’il obtint la nationalité française, avant de venir s’établir en Métropole en 1946 au moment de l’indépendance du Liban, et ses enfants furent naturalisés à ce moment, le jeune Guy étant le cadet des quatre.

Avec Joseph Bonnel et le chanoine Bessède à Montpellier

Il fit ses études dans un établissement privé, l’Enclos Saint-François de Montpellier, et joua dans l’équipe de football, où il fut repéré par l’entraîneur du SO Montpellier, Hervé Mirouze. Le SOM était alors dirigé par un ecclésiastique, le chanoine Bessède, et l’Enclos Saint-François par un abbé, d’où les relations ! Van Sam apparut à Mirouze comme « l’oiseau rare », le joueur décisif, le buteur qui manquait au SOM (qui n’est pas l’actuel club de Montpellier), associé à Joseph Bonnel, meneur de jeu. En division 2, il marquera 45 buts en 72 matchs. Il est donc remarqué, et sélectionné en équipe de France B en mars 1960, face à l’équipe d’Irlande B : cependant il ne parvient pas à scorer (0-0).

Heureusement pour lui, le prestigieux Racing Club de Paris s’intéresse à lui pour remplacer Thadée Cisowski et le transfère, il y côtoie alors Joseph Ujlaki, Pierre Grillet et François Heutte. Le Racing finit deux fois second du championnat de France, au goal-average en 1962 ! Guy Van Sam y brille par éclipses, scorant 50 fois en 96 matchs de D1. Néanmoins, et de façon plutôt inattendue, le très controversé sélectionneur de l’équipe de France Georges Verriest, décide de lui faire confiance à la fin de l’année 1961. Verriest cherche alors à tourner la page des « Anciens de Suède », en raison des blessures de Just Fontaine et Roger Piantoni, et de Raymond Kopa aussi, avec lequel il entretient des relations tendues. Il décide alors de lancer beaucoup de néophytes à la fois, ce qui est une erreur, surtout en compétition : or, il s’agit de se qualifier pour la Coupe du monde 1962.

L’obstacle n’apparaît nullement infranchissable, c’est la Bulgarie, une équipe défensive, bétonnante même, mais qui produit peu de jeu et marque souvent des buts de rapine. Au match aller, la France s’était facilement imposée 3-0, mais il y avait alors Fontaine et Piantoni. Ils n’y étaient plus au match retour, et Verriest avait commencé sa valse des essais en attaque (Mahi, Peyroche, Fulgenzi…), une attaque demeurée stérile (0-1). Restait alors une ultime chance, un match d’appui, à Milan.


 

Un barrage fatal contre la Bulgarie à Milan

Avant de le jouer, un match amical contre l’Espagne était destiné à tester une nouvelle attaque, avec Maryan Wisniewski, Henri Skiba, François Heutte et Guy Van Sam. Ce dernier avait déjà été lancé en octobre 1961 contre la Belgique (0-3) sans fruit : il est vrai que Verriest lui avait demandé d’opérer en retrait. Contre l’Espagne, Van Sam est cette fois-ci aligné dans un 4-2-4, donc en position offensive, mais décalé à gauche, alors qu’il n’est pas un ailier... Il ne s’en tire cependant pas trop mal, puisqu’il fournit à Heutte la passe en profondeur décisive pour l’ouverture du score ; il a intercepté de la main une passe de l’Espagnol Pachin, avant de servir Heutte, mais l’arbitre ne l’a pas vue !

S’appuyant sur ce match nul (1-1) estimé satisfaisant (la méthode Coué…), Verriest reconduit la même formation face aux Bulgares, à Milan. Mais là, c’est le fiasco. Un match de compétition est une tout autre affaire qu’un match amical, les Bulgares prennent les Bleus à la gorge. J’ai décrit ce match en détail dans mon livre Une Histoire Tactique des Bleus, auquel je me permets de renvoyer le lecteur. C’est un des pires fiascos de l’Histoire des Bleus, malgré l’étroitesse du score (0-1) et le fait que le but bulgare soit accidentel (Lerond détourne un tir de Yakimov), car le jeu des Français est absolument inexistant, on se croirait revenu dans les années 1920.


 

Dans ce naufrage, Van Sam ne parvient pas à surnager : il tente la carte personnelle, dribble un Bulgare, puis… bute sur le second : « Van Sam gâchait ce qu’il tentait par un dribble de trop », juge le Miroir des Sports. En quatre parties internationales (une de France B, trois de France A), le buteur n’a pas réussi à trouver le chemin des filets, ce qui démontre ses limites au niveau international, sans doute liées à un déficit athlétique, car c’est un bon technicien. Au tournant des années 1960, le football se durcit, les duels deviennent plus âpres, les marquages plus serrés : un footballeur doit désormais être un athlète.

Fin de carrière dans le Var, à Toulon et à la Valette

Bien entendu, Guy Van Sam ne réapparaîtra jamais plus sous le maillot bleu ; le ressort semble de plus cassé, le Racing descend en D2 en 1964, là encore, comble de malchance, au goal-average, pour un but, face à Toulon : la poisse semble s’acharner sur le club parisien, et sur Van Sam aussi. Toulon, qui justement va le faire signer, pour tenter de se maintenir en D1, mais en vain : le club, et Van Sam avec lui, retombe en D2. Mais Guy Van Sam (dont le frère aîné Richard a été sélectionneur à Tahiti !) a déjà décidé de se réorienter, hors football. Il a entamé des études de médecine à Paris, et les finalise à Toulon, où il deviendra kinésithérapeute, tout en jouant après 1968 pour le plaisir à La Valette – pas la capitale de l’île de Malte ! mais dans la modeste équipe de La Valette-sur-Var.

Les trois matchs de Guy Van Sam en équipe de France

Sel.GenreDateLieuAdversaireScoreTps Jeu
1 Amical 18/10/1961 Bruxelles Belgique 0-3 90
2 Amical 10/12/1961 Colombes Espagne 1-1 90
3 qCM 18/12/1961 Milan Bulgarie 0-1 90

Mots-clés

Entre 1904 et 1919, 128 internationaux ont porté au moins une fois le maillot de l’équipe de France. Si leur carrière internationale est la plupart du temps anecdotique, leur vie est souvent romanesque.

Vos commentaires

  • Le 10 mai à 15:59, par elise En réponse à : Guy Van Sam, une enfance libanaise

    sinceres condoleance a toute sa f amille j a ijoue avec guy car j ai joue pro aussi j ai habite aussi toulon ou je l ai retrouve salutations

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