Les éliminatoires de la Coupe du monde 2026 touchent à leur fin. L’équipe de France reçoit l’Ukraine puis se déplace en Azerbaïdjan pour décrocher les deux points nécessaires à sa qualification directe [1]. Le suspens est inexistant. Même si les Bleus se rendaient coupables d’une contre-performance à ce niveau, il leur resterait une session de barrages en mars 2026 pour rattraper le coup [2].
Foot partout, passion nulle part
Aucune effervescence n’entoure ces qualifiers, ainsi que l’on nomme désormais ces matchs éliminatoires par souci de marketing. Ces rencontres ne sont plus qu’un passage obligé pour les équipes nationales, quasiment assurées d’être présentes en phase finale.
Pour les joueurs, soumis à un devoir de performances dans un calendrier exigeant, il devient difficile de préserver une motivation minimale pour des rencontres qui n’apportent rien à leur prestige : une victoire est parfaitement normale et une contre-performance les place dans l’embarras.
Les télévisions ne s’efforcent même plus de vendre ces rencontres comme un produit majeur de leurs grilles. Les droits de diffusion sont négociés à la baisse. Et l’UEFA s’en inquiète. L’instance dirigeante du football européen envisage ainsi une refonte de cette phase éliminatoire.

Repenser la formule
Pour rendre ces matchs plus spectaculaires, les têtes pensantes du football européen réfléchissent à deux solutions. La première serait d’utiliser la Ligue des Nations comme compétition éliminatoire. On ne voit pas bien ce que cela changerait, mais l’idée a le mérite d’admettre que l’épreuve créée en 2018 ne fait que surcharger un calendrier déjà bien compliqué. Et qu’elle brouille la lisibilité des compétitions existantes. Remplacer les éliminatoires par la Ligue des nations ressemblerait ainsi surtout à un correctif.
La seconde idée serait de prendre exemple sur la Ligue des champions, et le modèle éliminatoire qu’elle a mis en place à l’orée de la saison 2024/2025 : une poule unique qui réunirait les cinquante-cinq nations de l’UEFA, dix à quinze rencontres pour chacune afin d’établir un classement qui qualifierait les mieux classées à un moment T.
L’idée ne manque pas de charme et a fait ses preuves en Ligue des champions : elle permet de créer des “affiches” sans mettre en péril le destin des deux équipes opposées. Cela reste une solution bien fragile. Le public ne sera jamais dupe de l’artificialité de ces affiches. Pour qu’un match de football passionne la foule, il faut une mise à mort. L’une des deux équipes doit tomber, quitte à faire pleurer tout un pays.
Où sont les France-Pays-Bas d’antan ?
La phase éliminatoire des Coupes du monde existe depuis 1934, précisément depuis que le nombre d’équipes inscrites est supérieur au nombre de participants à la phase finale. Très vite l’Europe a adopté un système d’éliminatoires par poule, d’autant plus palpitant que les places pour la phase finale sont, à l’époque, assez chères (même si l’Europe a toujours été privilégiée). Il est à noter que chaque confédération organise ses éliminatoires comme elle l’entend. La Conmebol, confédération sud-américaine, a souvent procédé à un championnat intégral réunissant dix nations affiliées. Les autres confédérations privilégient les groupes de quatre à six équipes, y compris l’Afrique qui avait longtemps opté pour une formule par élimination directe en matchs aller-retour.
Aujourd’hui, les éliminatoires n’enflamment plus le Vieux continent. Il n’existe plus de France-Pays-Bas 1981 ou même de France-Bulgarie 1993 pour mobiliser le pays. Il faut passer par les barrages façon France-Irlande 2009 ou France-Ukraine 2013 pour retrouver un peu de frissons. L’élargissement du nombre d’équipes en phases finales (seize équipes européennes sont attendues lors de la prochaine Coupe du monde) affaiblit inévitablement l’intérêt pour cette phase préliminaire.
La nouvelle formule, si elle est adoptée par l’UEFA, sera appliquée à partir de 2028 pour la Coupe du monde 2030. Il est à craindre qu’elle ne résolve que partiellement le problème. Il est pourtant nécessaire de sauvegarder l’intérêt pour les épreuves de sélections nationales, qui perd beaucoup de terrain ces dernières années au profit des épreuves de clubs. Et ce n’est pas en gonflant le nombre d’équipes en phases finales que l’on réglera ce problème, bien au contraire.








