Et si…

Publié le 13 novembre 2013 - Bruno Colombari

Pour beaucoup, l’affaire est entendue : sur la lancée de ses bons résultats d’octobre, l’équipe de France va se qualifier pour le Brésil. Prenons quand même le temps de voir ce qui se passerait si ce n’était pas le cas.

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Après neuf phases finales consécutives (depuis 1995) ponctuées par deux titres, une finale, une demi-finale, deux quarts de finale et trois éliminations au premier tour, les Bleus vont tenter d’obtenir un billet pour le Brésil face à l’Ukraine. Imaginons ce qui pourrait se passer au cas où ces barrages finiraient mal.

Les jours d’après

Tout va dépendre des circonstances de l’élimination. Si c’est sur des erreurs de coaching, ou d’Evra, on peut imaginer que la pression médiatique sera forte pour pousser Deschamps à la démission, même si le président de la FFF, Noël Le Graët, le soutient.

A l’été 2012, à sa nomination à la tête de l’équipe de France, Didier Deschamps est très clair : « S’il y a un échec, je pars de moi-même. Je suis un compétiteur, et la mission est d’aller à la Coupe du monde. C’est difficile, c’est une évidence, mais l’idée est de remplir d’abord cette première mission. » (9 juillet 2012).

Le 11 novembre 2013, dans les colonnes de l’Equipe, il l’est beaucoup moins : « qu’est-ce que j’ai dit ? Je dis des choses, et parfois je change... » Mais il ne se cache pas qu’une prolongation de contrat (jusqu’à l’Euro 2016) est prévue en cas de qualification.

Avec ou sans Deschamps...

Même si ce n’est pas l’hypothèse la plus plausible, imaginons que Deschamps quitte son poste. Dans ce cas, quelles sont les options possibles ? La première est, classiquement, la filière interne à la fédération. En clair, il s’agit de promouvoir un homme déjà sous contrat à la FFF, ce qui s’est fait avec Michel Hidalgo, Henri Michel, Gérard Houllier, Aimé Jacquet, Roger Lemerre et Raymond Domenech. Le plus probable dans cette hypothèse est Willy Sagnol, actuel sélectionneur des Espoirs. L’homme est ambitieux : nommé manager des équipes de France de jeunes, il a pris en charge les U20 lors du tournoi de Toulon cette année, avant de prendre la place de Pierre Mankowski à la tête des Espoirs. Son manque certain d’expérience sur le banc pourrait être un handicap.

Une autre hypothèse serait de débaucher un entraîneur français à la tête d’un grand club européen, ce qui serait une première en équipe de France depuis Stefan Kovacs (à l’Ajax en 1973). Le seul correspondant à ce profil serait le coach d’Arsenal, Arsène Wenger, dont on annonce régulièrement le départ d’un club avec lequel il échoue depuis des années. Mais Arsenal est actuellement en tête de la Premier League. On voit donc mal Wenger partir maintenant, à moins qu’il négocie pour prendre la sélection sans quitter Londres jusqu’à la coupe du monde. Une hypothèse peu probable.

Un autre cas de figure consisterait à appeler un entraîneur de Ligue 1. C’est ce qu’avait choisi la FFF pour Jacques Santini (ex-Lyon), Laurent Blanc (ex-Bordeaux) et Didier Deschamps (ex-OM) depuis 2002. Mais parmi les entraîneurs actuels, bien peu semblent avoir le profil et la carrure d’un sélectionneur : Philippe Montanier (Rennes) et Christian Gourcuff (Lorient) ont une cote élevée chez les amateurs de beau jeu, mais leur palmarès ne plaide pas en leur faveur, alors que les trois précédents cités avaient été champions de France.

Enfin, même si l’hypothèse fait plutôt sourire, on peut aussi imaginer que la FFF persiste dans sa filière France 98 en attirant le dernier gros poisson qui manque à la collection. Zinedine Zidane n’a jamais caché son envie de devenir sélectionneur, même si ses compétences en la matière semblent bien plus minces que celles de Blanc et Deschamps. Il est certes en poste au Real Madrid aux côtés de Carlo Ancelotti, mais son implication chez les Merengue ne ferait sans doute pas le poids dans son esprit face à un poste à responsabilité chez les Bleus. Une autre donnée est à prendre en compte dans l’équation Zidane : l’avenir international de son fils aîné Enzo, qui aura 19 ans en mars prochain, et qui joue dans l’équipe réserve du Real. Sélectionnable aussi bien en Espagne qu’en France (il a la double nationalité par sa mère), Enzo serait-il plus enclin à choisir les Bleus si son père était nommé sélectionneur ?

Qui reste, qui part ?

On le voit, les options alternatives à Deschamps ne sont pas légion. L’hypothèse la plus probable en cas d’élimination honorable serait donc que le Basque reste à la tête des Bleus jusqu’à l’Euro 2016. Rappelons que Michel Hidalgo a été maintenu lors de l’élimination des Bleus de l’Euro 80, et que Platini est resté (après avoir promis de partir) malgré l’absence de l’équipe de France à la coupe du monde italienne en 1990.

Dans ce cas, le sélectionneur se retrouverait dans une situation inédite : trente mois de matches amicaux jusqu’à l’Euro 2016, puisque les Bleus sont qualifiés d’office en tant que pays organisateur. Or, les trois fois où c’est déjà arrivé (avant l’Euro 1984, avant la coupe du monde 1998 et avant celle de 2002), l’équipe de France avait disputé une phase finale deux ans avant, ce qui avait réduit la période sans compétition à 20 mois.

Que faire pendant cette période très longue ? Trente mois, cela représente environ vingt-cinq matches amicaux. Il faudra déjà trouver des adversaires, ce qui ne sera pas facile puisque la plupart des équipes seront occupées par les phases qualificatives.

Une aussi longue période sans enjeu pourrait être mise à profit pour former un groupe relativement restreint d’une vingtaine de joueurs. On imagine que Didier Deschamps s’appuierait sur la génération des U20, dont certains pourraient rapidement devenir des cadres (Pogba, Varane et dans une moindre mesure Digne et Kondogbia). On pourrait voir bientôt apparaître en sélection Kurt Zouma, Samuel Umtiti, Florian Thauvin, Antoine Griezmann, Adrien Rabiot ou Jordan Veretout.

D’autres joueurs relativement jeunes (Lloris, Giroud, Matuidi, Benzema, Cabaye, Nasri, Rémy, Koscielny) pourraient aussi rester. Enfin, parmi les plus expérimentés, Si Franck Ribéry devrait logiquement devenir le chef de file de la nouvelle génération, il est probable que Patrice Evra (32 ans), Eric Abidal (34 ans) et Mickaël Landreau (34 ans) mettront un terme à leur carrière internationale.

Ces choix, le futur sélectionneur devra les faire, que ce soit Deschamps ou un autre. La différence, c’est que Deschamps devrait trouver une nouvelle légitimité en cas de non-qualification. Un nouveau sélectionneur n’aurait pas ce problème.

Mots-clés

Entre 1904 et 1919, 128 internationaux ont porté au moins une fois le maillot de l’équipe de France. Si leur carrière internationale est la plupart du temps anecdotique, leur vie est souvent romanesque.

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Hommage à Pierre Cazal