Au printemps 1992, Jean-Pierre Papin fait ses adieux au stade Vélodrome après un quatrième titre de champion de France consécutif et six saisons passées au club pendant lesquelles il aura à peu près tout gagné (une Coupe de France en 1989, cinq fois meilleur buteur du championnat et un Ballon d’Or en 1991), tout sauf la Coupe d’Europe. Il l’a pourtant vue de près, un soir à Bari contre l’Etoile Rouge.
Sur le banc à Munich
Papin quitte à 28 ans Marseille pour l’AC Milan, alors le plus grand club d’Europe, fort de ses deux titres continentaux en 1989 et 1990 et de sa redoutable triplette néerlandaise Rijkaard, Gullit et Van Basten. Mais il y a aussi le Croate Zvonimir Boban et le Serbe Dejan Savicevic, ce qui fait six étrangers avec JPP alors que seulement trois peuvent être alignés sur la feuille de match.
Et le 29 mai 1993, alors qu’il retrouve l’OM au stade olympique de Munich, il débute la finale de la première Ligue des Champions sur le banc. Il entre à la 54e minute à la place de Roberto Donadoni, mais ne peux rien faire pour empêcher son ancien club de s’imposer 1-0. En face, une jeune génération de joueurs français prend le pouvoir : Fabien Barthez, Marcel Desailly et Didier Deschamps seront champions du monde cinq ans plus tard. Sans Papin.
Bis repetita
Trente-deux ans plus tard, l’histoire semble se répéter. Kylian Mbappé quitte le PSG en mai 2024, après sept années au cours desquelles il a remporté six fois le championnat de France et terminé six fois meilleur buteur. Il a également gagné quatre Coupes de France et une Coupe de la Ligue. Bref, quasiment tout, sauf la Ligue des Champions. Lui aussi a joué et perdu une finale, en 2020 contre le Bayern à Lisbonne.
A 26 ans, Mbappé rejoint donc le Real Madrid, sans doute deux ans trop tard et après deux dernières saisons compliquées. Mais contrairement à Papin, il n’a pas encore remporté de Ballon d’Or. Ses stats en équipe de France sont en revanche bien meilleures, avec une Coupe du monde et une Ligue des Nations, là où JPP n’avait qu’une troisième place mondiale à se mettre sous la dent.
Une Coupe du monde, pas de Ballon d’or, mais beaucoup de similitudes
La première saison de Mbappé au Real est contrastée : décevante d’un point de vue collectif avec une supercoupe d’Europe et une Coupe intercontinentale, mais deux défaites en finale de Coupe du Roi et de Supercoupe d’Espagne, une deuxième place en Liga et une élimination en quart de finale de Ligue des Champions. Mais plutôt réussie d’un point de vue individuel avec un double titre de meilleur buteur du championnat d’Espagne (31 buts en 34 matchs) et de Soulier d’or européen.
Lors de la finale à Munich gagnée par le PSG, il n’est pas dans l’équipe d’en face mais devant sa télévision. Pourtant, comme Papin, c’est l’année où il a quitté le meilleur club français du moment pour rejoindre le meilleur club européen que le premier a remporté le trophée et que le second a échoué. Son départ de la capitale marque l’avènement, autour d’un Ousmane Dembélé métamorphosé, d’une génération prometteuse de néo-internationaux comme Bradley Barcola et Désiré Doué.
Et après ?
Rappelons la suite de l’histoire : avec l’AC Milan, Papin fait une deuxième saison décevante (18 matchs, 5 buts) mais il remporte la Ligue des Champions sans figurer sur la feuille de match contre Barcelone. En équipe de France, il jouera encore dix matchs et inscrira cinq buts, mais ne sera plus aligné après janvier 1995 et une 54e cape, à 31 ans (30 buts marqués).
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Mbappé n’est probablement qu’au milieu de sa carrière, ou à peine plus, et il compte déjà 88 sélections et 48 buts en équipe de France. Il a largement le temps de remporter la Ligue des Champions, que le Real a gagné cinq fois lors des dix dernières saisons. Et, pourquoi pas, de regagner la Coupe du monde l’an prochain, voire l’Euro en 2018, le seul titre qui lui manque en sélection. Et sa quête du Ballon d’or commencée en 2018 se poursuivra.
Mais, en l’état, la trace qu’il laissera dans le football français est inconnue. Papin était le chef de file d’une génération intermédiaire, celle située entre Platini et Zidane. Mbappé sera-t-il celui d’une génération calée entre celle de Griezmann et d’un joueur à venir ?
