Maracanã, un stade dans l’histoire des Bleus

Publié le 22 juin 2020 - Richard Coudrais

Le 30 juin 1977, L’équipe de France découvrait l’un des stades les plus prestigieux du monde, le Maracanã de Rio. Elle y reviendra 37 ans plus tard mais les choses auront bien changé.

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Le monde du football ne manque pas d’enceintes remarquables, mais en terme de prestige pur, celles-ci ne sont que deux à postuler pour la première place : Wembley, le stade londonien construit en 1923, et le Maracanã, érigé à Rio de Janeiro en 1950.

L’équipe de France a officiellement disputé onze rencontres au Brésil mais elle n’a foulé la pelouse du Maracanã qu’en trois occasions. Cela n’empêche pas l’enceinte de faire partie de son histoire. Le 30 juin 1977, les hommes de Michel Hidalgo, baladés pendant une heure par les coéquipiers de Rivelino, avaient remonté un handicap de deux buts grâce à un enchaînement extraordinaire de Didier Six puis une reprise de la tête que Marius Trésor qui ne l’était pas moins. Un match fondateur qui donnait à la jeune équipe de Michel Hidalgo des raisons de croire à de glorieux lendemains.

Un stade géant prévu pour 1942, puis 1949, et finalement 1950

Le stade Maracanã a été construit pour la Coupe du monde 1950. Il aurait donc pu naître une dizaine d’années plus tôt puisqu’il était prévu que le Brésil organise le quatrième mondial dès 1942. Le pays était du moins candidat au même titre que l’Argentine et l’Allemagne. La Seconde Guerre Mondiale a finalement remis le projet à plus tard.

A la fin de la guerre, le Brésil reste le seul pays candidat à l’organisation de la quatrième Coupe du monde prévue en juin 1949. Le cinquième plus grand pays du monde dispose de nombreux stades, mais de taille moyenne. Il est nécessaire de faire construire une enceinte d’envergure, de préférence à Rio de Janeiro qui est encore la capitale (Brasilia ne sera créée qu’en 1960).

Le projet est confié à Mario Filho, un journaliste du Jornal dos Sports qui milite depuis de longs mois pour la construction de ce stade, et qui parvient, exploit remarquable, à fédérer toutes les bonnes volontés autour du projet. Si plusieurs quartiers sont candidats à l’accueil de l’enceinte, le choix est porté sur celui de Maracanã, au coeur de la cité carioca.

Mais le projet a déjà pris beaucoup de retard, ce qui contraint la FIFA à reporter le tournoi à 1950. Les travaux démarrent en août 1948. 1500 ouvriers se relaient jour et nuit pour ériger l’édifice en vingt-deux mois. Lorsque sont achevés les travaux, le stade compte plus de 183 000 places assises, capacité qui augmente à 200 000 lorsqu’une partie des spectateurs restent debout. Il dépasse largement l’Hampden Park de Glasgow et ses 150 000 places, qui perd dès lors son titre de plus grand stade du monde.

Le stade Municipal de Rio (son nom officiel) est, de justesse, prêt pour la Coupe du monde. Il est inauguré le 24 juin 1950 par la rencontre d’ouverture du tournoi, que le Brésil remporte 4-0 face au Mexique. Huit rencontres, dont cinq du Brésil, se déroulent dans ce stade que tout le monde appelle finalement Maracanã, du nom du quartier.

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16 juillet 1950, le jour des maudits

Aucune finale n’est prévue pour la Coupe du monde 1950, le tournoi se terminant par une poule de quatre équipes sous forme de championnat. Le match décisif a lieu le 16 juillet qui oppose le Brésil à l’Uruguay. L’équipe brésilienne a tellement survolé le tournoi qu’on l’imagine mal ne pas remporter cette ultime rencontre [1]. Les autorités brésiliennes ont prévu toutes sortes de festivités pour fêter dignement le premier titre de la seleçao. La seule chose à laquelle personne n’a pensé est la victoire de l’Uruguay (2-1). Le pays sombre dans une immense tristesse.

D’objet d’orgueil national, le Maracanã prend alors le statut de stade maudit. Mais il n’en continue pas moins de vivre et d’accueillir un grand nombre de rencontres. Le stade majeur n’a pas de club résident mais il accueille volontiers les grandes rencontres des équipes de Rio. En décembre 1963, un derby Fla-Flu (Flamengo contre Fluminense) attire 194.603 spectateurs, record mondial d’affluence pour un match de clubs.

L’enceinte a pris le nom officiel de Estadio Municipal Mario Filho, en hommage à son créateur décédé en 1966 d’une crise cardiaque à l’âge de 58 ans. Mais à la manière d’un artiste qui a adopté un nom de scène, le stade de Rio construira sa légende sous le nom de Maracanã.

Le nom fait rêver. Pour sa capacité d’accueil hors normes (même si le chiffre de 200 000 a toujours été un peu contesté), pour les grands joueurs qui foulent sa pelouse (nous sommes à l’époque du roi Pelé, de Garrincha puis de Tostao... ), par les compte-rendus enflammés diffusés par la presse, par les rares images provenant de ce stade, souvent lointaines, le stade nourrit l’imaginaire des passionnés de foot du monde entier. Le 19 novembre 1969, Pelé inscrit sur penalty le millième but de sa carrière. Quel autre stade pouvait accueillir un tel événement ?

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Si tu vas à Rio...

L’équipe de France aurait pu découvrir le Maracanã dès 1950 si elle avait accepté de répondre favorablement à l’invitation des organisateurs de la Coupe du Monde brésilienne qui cherchaient désespérément à pallier la défection de l’Ecosse.

Vingt-deux ans plus tard, la FFF accepte une invitation pour la sélection tricolore à participer à la Taça Independencia, un grand tournoi international organisé au Brésil. Mais l’équipe de Georges Boulogne ne va pas suffisamment loin dans l’épreuve pour avoir les honneurs du plus grand stade du monde.

Ce n’est donc qu’en juin 1977, à l’occasion de la tournée sud-américaine qui les conduit en Argentine et au Brésil, que les Tricolores découvrent l’enceinte mythique. Les hommes de Michel Hidalgo arrachent un match nul à la seleçao (2-2) puis sortent sous les acclamations du public.


 

Trente-sept ans après

Quand l’équipe de France revient au Maracanã trente-sept ans plus tard, à l’occasion de la Coupe du monde 2014, le stade n’a plus rien à voir avec la légende. Mal entretenue et tombant en ruine, l’ancienne enceinte ne présentait plus aucune garantie de sécurité. Elle a été complètement détruite pour laisser place à un nouveau stade de 75 000 places couvertes. Celui-ci est inauguré en juin 2013 et testé dans la foulée avec la Coupe des Confédérations.

Sept rencontres de la Coupe du Monde 2014 se déroulent dans l’enceinte qui n’a plus de prestigieuse que le nom. L’équipe de France y joue deux fois : un match du premier tour contre l’Equateur, ponctué par un 0-0 qui ne remet pas en cause sa qualification. Puis un quart de finale perdu (0-1) contre l’Allemagne, laquelle remportera le tournoi une semaine plus tard après s’être imposé en finale sur cette même pelouse.

L’équipe de Didier Deschamps n’a donc inscrit aucun but lors de ses deux passages. Ni Benzema, ni Griezmann, ni aucun autre tricolore de cette Coupe du monde n’a su rejoindre Didier Six et Marius Trésor dans le cercle des buteurs tricolores dans l’enceinte mythique de Rio. Lloris, Sakho, Koscielny, Pogba, Matuidi, Benzema, Griezmann, Varane, Giroud et Rémy pourront toujours avancer qu’ils y ont joué une fois de plus que tout autre tricolore.

dategenreadversairescoreaffluence
30/06/1977 Amical Brésil 2-2 83 535
25/06/2014 Premier tour de la Coupe du Monde Equateur 0-0 73 749
04/07/2014 Quart de finale de la Coupe du Monde Allemagne 0-1 74 240

Dans la légende olympique

Deux ans après la Coupe du monde, le nouveau Maracanã accueillera la cérémonie d’ouverture (puis de fermeture) des Jeux Olympiques de Rio. Plusieurs matchs des tournois masculins et féminins s’y dérouleront. L’équipe masculine du Brésil remportera l’ultime trophée qui manquait à son palmarès, la médaille d’or olympique. Les Jeux Paralympiques en septembre auront aussi pour cadre le stade de Rio.

Victime collatérale à l’issue des Jeux d’une affaire juridico-financière sur fond de politique et de corruption, le stade sera fermé de longs mois avant de pouvoir accueillir de nouveau des rencontres de football. La seleçao et les clubs au nom prestigieux qui y évoluent (Flamengo, Fluminense, Botafogo...) se chargent d’entretenir la légende.


 

[1Un match nul aurait même été suffisant pour que le Brésil remporte la Coupe Jules-Rimet.

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