Georges Bereta, prince du Forez

Publié le 5 juillet 2023 - Richard Coudrais

Georges Bereta, décédé le 4 juillet 2023, fut l’un des plus grands joueurs de l’histoire du football français. Multiple champion avec l’AS Saint-Étienne, capitaine de l’équipe de France avec qui il compte 44 sélections, il a malheureusement connu son apogée pendant les années noires du football hexagonal.

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Georges Bereta a disputé plus de cinquante matchs avec l’équipe de France. Son compteur officiel s’arrête à 44 sélections, mais il a également disputé une poignée de rencontres organisées contre les équipes de clubs, très fréquentes à l’époque et considérées comme des rendez-vous importants. Son total de 44 sélections l’a porté, à la fin de sa carrière, à la sixième place des joueurs de l’équipe de France les plus sélectionnés de l’histoire.

Un polonais dans le Forez

Le Stéphanois (il est né le 11 mai 1946 dans la ville verte) est appelé pour la première fois en équipe de France par Louis Dugauguez, à l’occasion d’un déplacement des Tricolores à Varsovie, le 17 septembre 1967. Les Français s’imposent 4-1 avec trois débutants dans leurs rangs : Henri Michel, Jean Baeza et Roland Mitoraj. Bereta, lui, n’a pas été aligné. Il aurait été savoureux que son histoire internationale débute à Varsovie, lui qui est né d’un père polonais venu s’installer dans le Forez.

S’il n’est pas très grand (1,66 mètre), Bereta est un joueur puissant, rapide et doté d’un dribble qui en font un danger permanent sur l’aile gauche de l’AS Saint-Étienne. Finaliste de la Gambardella 1964 avec les Juniors, il intègre le groupe pro qui conquiert le titre de champion de France en 1967. Le troisième du club forézien et le premier d’un quadruplé qui posera l’ASSE au sommet du football français.

Bereta connaît sa première sélection en décembre 1967 à l’occasion d’un match contre le Luxembourg. Il se place à l’aile gauche, forçant Charly Loubet à se décaler à droite. Une option gagnante puisque le Niçois est l’auteur de trois buts, le dernier sur une passe du Stéphanois. Son premier but tricolore, Bereta l’inscrit trois mois plus tard à l’occasion d’une rencontre de préparation contre le club italien du Torino (un club qu’il avait déjà affronté en bleu en 1967 à l’occasion d’une rencontre avec l’équipe de France B).

Rendez-vous manqués

L’équipe de France a terminé en tête de son groupe éliminatoire de la Coupe d’Europe des nations, une performance qui donne un peu d’espérance après la déception causée par la précoce élimination de la World Cup 1966. Les quarts de finale opposent les Tricolores à la Yougoslavie. Bereta dispute le match aller au stade vélodrome de Marseille. Les hommes de Dugauguez arrachent un pénible match nul face aux coéquipiers d’Ivica Osim. Le Stéphanois ne sera pas appelé pour le match retour à Belgrade, ce qui lui épargnera de subir une lourde défaite (5-1).

L’objectif est désormais d’obtenir la qualification pour la Coupe du monde 1970 et Louis Dugauguez compte sur les Stéphanois, pour cette nouvelle conquête : Bereta est régulièrement appelé, aux côtés de Hervé Revelli, Bernard Bosquier, Aimé Jacquet, Robert Herbin, Roland Mitoraj et Georges Carnus.

Mais les éliminatoires pour le Mondial mexicain démarrent très mal : À Strasbourg, les Tricolores sont battus 0-1 par la Norvège, qui compte pourtant parmi les sélections les moins performantes du continent. Le football français est au plus bas et le sélectionneur décide de jeter l’éponge. Quand Georges Boulogne reprend l’équipe de France, celle-ci prend à Wembley une volée historique (5-0) face aux champions du monde. Bereta est de tous ces rendez-vous manqués.

Un coup franc au Parc

Le nouveau sélectionneur ne peut enrayer la spirale négative. La victoire surprise des Norvégiens a profité à la Suède qui décroche le ticket pour Mexico. Bereta garde la confiance de Georges Boulogne, qui l’utilise plus volontiers comme milieu gauche. L’époque reste à la grimace. Les éliminatoires de la Coupe d’Europe des Nations se passent mal, les Français ayant eu fort à faire avec la Hongrie et la Bulgarie.

La fédération organise des tournées exotiques afin de souder le groupe autant que possible. Bereta est du périple en Amérique du Sud au début de l’année 1971, avec en point d’orgue la belle victoire (4-3) des Tricolores sur l’Argentine à la Bombonera de Buenos Aires. L’ailier stéphanois participe également à la Taça da Independança (ou Minicopa) et y inscrit son premier but en bleu contre la sélection du Concacaf.


 

Bereta inscrit un nouveau but quatre mois plus tard dans un Parc des princes flambant neuf contre l’URSS sur un coup franc indirect, signant d’une frappe à ras-de-terre une victoire (1-0) qui lance idéalement les éliminatoires de la Coupe du monde 1974. Malheureusement, les rêves d’Allemagne s’estompent un mois plus tard après une défaite en Irlande. Elle sera suivie d’un match nul au Parc contre ces mêmes Irlandais puis une défaite à Moscou qui renvoie définitivement les Français à leurs vieux démons.

Un brassard et une affaire

Au début de la saison 1973-1974, le destin de l’équipe de France est confié à Stefan Kovacs, et le Roumain fait de Georges Bereta son capitaine. Le Stéphanois, à 27 ans, est au sommet de sa carrière. Si l’AS Saint-Etienne est quelque peu bousculée par l’OM et Nantes, son joueur emblématique n’en reste pas moins le meilleur du pays, comme en attestent plusieurs distinctions données par la presse.

L’oncle Stefan, s’il apporte un peu de sourire à l’équipe de France, ne fera pas vraiment de meilleurs résultats. Le football français se tourne alors vers le Forez où Bereta et ses coéquipiers verts s’installent dans le paysage européen, signant un exploit mémorable contre Hajduk Split. Mais le capitaine des Verts verra ensuite sa carrière s’engloutir dans une sordide affaire de transfert conclu dans son dos par des dirigeants de clubs peu regardants sur l’éthique. L’affaire Bereta, au cœur de la saison 1974-1975 fera la une des journaux pendant un mois et affectera le principal intéressé.

Le capitaine tricolore, devenu Marseillais, dispute son dernier match en bleu le 25 mai 1975 à Reykjavik en Islande (0-0). Il est convoqué au début de la saison 1975-1976 pour la réception des mêmes Islandais à Nantes, mais il reste sur le banc de touche, le brassard étant confié à Henri Michel. Sa carrière internationale a pris fin avant même qu’il atteigne les trente ans.

44 sélections, 17 victoires et 17 défaites

Geroges Bereta compte 44 sélections officielles en équipe de France pour 17 victoires, 10 matches nuls et 17 défaites. Il a inscrit 4 buts pour un temps de jeu de 3656 minutes selon le site FFF. Il a connu trois sélectionneurs : Louis Dugauguez (1967-1968), Georges Boulogne (1969-1973) et Stefan Kovacs (1973-1975).

Sel.MatchDateLieuAdversaireScoreTpsbutsnotes
France B 17/05/1967 Nancy Torino 0-4 90
1 qEuro 23/12/1967 Paris (Parc) Luxembourg 3-1 90
n/o 13/03/1968 Nice Torino 1-1 90 1 but
2 qEuro 06/04/1968 Marseille Yougoslavie 1-1 90
n/o 27/08/1968 Saint-Etienne Bayern Munich 1-1 90
3 Amical 25/09/1968 Marseille RFA 1-1 90
4 Amical 17/10/1968 Lyon Espagne 1-3 90
5 qCM 06/11/1968 Strasbourg Norvège 0-1 90
Espoirs 12/02/1969 Lyon Hongrie 2-2 90
6 Amical 12/03/1969 Londres Angleterre 0-5 90
Espoirs 16/04/1969 Grenoble Italie Espoirs 2-0 90
7 Amical 30/04/1969 Paris (Parc) Roumanie 1-0 > 45
8 qCM 15/10/1969 Solna Suède 0-2 90
9 qCM 01/11/1969 Paris (Parc) Suède 3-0 90
10 Amical 08/04/1970 Rouen Bulgarie 1-1 65 >
11 Amical 28/04/1970 Reims Roumanie 2-0 90
12 Amical 03/05/1970 Bâle Suisse 1-2 90
13 Amical 05/09/1970 Nice Tchécoslovaquie 3-0 90
14 Amical 07/10/1970 Vienne Autriche 0-1 90
15 Amical 08/01/1971 Buenos Aires Argentine 4-3 82 >
16 Amical 13/01/1971 Mar del Plata Argentine 0-2 69 >
n/o 18/01/1971 Curitiba Coritiba FC 1-2 90
n/o 21/01/1971 Porto Alegre SC Internacional 3-1 90
n/o 24/01/1971 Lima Universitario 0-0 90
17 Amical 17/03/1971 Valence Espagne 2-2 90
18 qEuro 24/04/1971 Budapest Hongrie 1-1 90
19 qEuro 08/09/1971 Oslo Norvège 3-1 90
20 qEuro 09/10/1971 Colombes Hongrie 0-2 90
21 qEuro 04/12/1971 Sofia Bulgarie 1-2 > 15
22 Amical 08/04/1972 Bucarest Roumanie 0-2 70 >
23 Amical 11/06/1972 Salvador de Bahia* CONCACAF 5-0 90 1 but
24 Amical 15/06/1972 Maceio* Afrique 2-0 45 >
25 Amical 18/06/1972 Salvador de Bahia* Colombie 3-2 > 45
26 Amical 25/06/1972 Salvador de Bahia* Argentine 0-0 90
27 Amical 02/09/1972 Athènes Grèce 3-1 90
28 qCM 13/10/1972 Paris (Parc) URSS 1-0 90 1 but
29 qCM 15/11/1972 Dublin Irlande 1-2 90
30 Amical 03/03/1973 Paris (Parc) Portugal 1-2 90
31 qCM 19/05/1973 Paris (Parc) Irlande 1-1 90
32 qCM 26/05/1973 Moscou URSS 0-2 90
33 Amical 08/09/1973 Paris (Parc) Grèce 3-1 90 (cap)
34 Amical 13/10/1973 Gelsenkirchen RFA 1-2 90 (cap)
35 Amical 21/11/1973 Paris (Parc) Danemark 3-0 90 1 but (cap)
n/o 19/02/1974 Lille Anderlecht 0-2 90 (cap)
36 Amical 23/03/1974 Paris (Parc) Roumanie 1-0 90 1 but (cap)
37 Amical 27/04/1974 Prague Tchécoslovaquie 3-3 90 (cap)
38 Amical 18/05/1974 Paris (Parc) Argentine 0-1 90 (cap)
UNFP 20/08/1974 Paris (Parc) FC Cologne 0-0 90 (cap)
39 Amical 07/09/1974 Wroclaw Pologne 2-0 90 (cap)
40 qEuro 12/10/1974 Bruxelles Belgique 1-2 90 (cap)
41 qEuro 16/11/1974 Paris (Parc) RDA 2-2 90 (cap)
42 Amical 26/03/1975 Paris (Parc) Hongrie 2-0 90 (cap)
43 Amical 26/04/1975 Colombes Portugal 0-2 72 > (cap)
n/o 21/05/1975 Rouen Queens Park Rangers 3-0 90 (cap)
44 qEuro 25/05/1975 Reykjavik Islande 0-0 90 (cap)

pour finir...

La rédaction de cet article a nécessité la consultation des sites selectiona.free.fr, FFF, Wikipédia, la lecture d’anciens exemplaires de France-Football, L’Équipe, les Cahiers de L’Équipe... ainsi que des ouvrages « Bereta, coeur de lion » de Gérard Ernault (Calmann-Levy 1975), « La fabuleuse histoire du football » de Jacques Thibert et Jean-Phlippe Rethacker (Nathan, 1990), « L’intégrale de l’équipe de France de football » de Pierre Cazal, Jean-Michel Cazal et Michel Oreggia (First édition, 1998), « Les 1000 joueurs de l’équipe de France » de Jérôme Bergot (Talent Sport, 2021), « Le Dico des Bleus » de Matthieu Delahais, Bruno Colombari et Alain Dautel (Marabout, 2017-2018-2022), « Les 50 meilleurs joueurs de l’ASSE » de Benjamin Danet (Scotty 2023) et la collection « L’année du football » de Jacques Thibert (Calmann-Levy).

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