28 juin 2021, Bucarest, huitième de finale de l’Euro contre la Suisse : 3-3 à la fin du temps réglementaire, prolongations puis tirs au but (perdus 4-5). 18 décembre 2022, Lusail, finale de la Coupe du monde face à l’Argentine : 2-2 à la fin du temps réglementaire, prolongations, 3-3, puis tirs au but (perdus 2-4). 5 juillet 2024, Hambourg, quart de finale de l’Euro contre le Portugal : 0-0 à la fin du temps réglementaire, prolongations puis tirs au but (gagnés 5-3).
Les Bleus ont donc joué leurs trois derniers tournois majeurs en passant par des prolongations, alors qu’ils n’en avaient disputé qu’une seule depuis juillet 2006, celle perdue (déjà) face au Portugal en 2016. En mettant de côté, bien sûr, le barrage retour contre la République d’Irlande en novembre 2009, mais qui n’était pas un match de phase finale.
C’est donc 2018 qui est devenu une exception, avec quatre matchs à élimination directe pour les Bleus, contre une Croatie passée par trois prolongations pour atteindre la finale (Danemark, Russie et Angleterre). Avant cette date, l’équipe de France n’avait atteint le dernier carré d’un grand tournoi sans prolongations qu’en 1958, si l’on met de côté le format particulier de la première Coupe d’Europe des nations en 1960 [1]. Auparavant, en 1934, elle avait disputé et perdu sa première prolongation de l’histoire contre l’Autriche (2-3) en huitième de finale de la Coupe du monde.
Entre 1982 et 1986, les Bleus ont joué 8 matchs à élimination directe. 4 sont allés en prolongations (RFA 82, Portugal 84, Brésil et Belgique 86) dont deux aux tirs au but (RFA et Brésil). Après avoir perdu le premier, l’équipe de France a remporté les trois suivants.
Entre 1996 et 2006, les Bleus ont joué 13 fois en élimination directe. 6 matchs sont allés en prolongations (Pays-Bas et Rep tchèque en 1996, Paraguay et Italie en 1998, Italie en 2000, Italie en 2006) dont 4 aux tirs au but. Là aussi, le bilan est favorable, avec quatre qualifications pour deux éliminations.
Entre 2012 et 2024, les Bleus ont joué 22 fois en élimination directe. Quatre matchs sont allés en prolongations : la finale perdue contre le Portugal en 2016, le huitième face à la Suisse en 2021, la finale de 2022 contre l’Argentine et le quart de 2024 devant le Portugal. Autrement dit, 11 fois l’équipe de France a plié le résultat en 90 minutes, 3 fois (Espagne 2012, Allemagne 2014 et Portugal 2016) elle a été battue sans avoir marqué le moindre but et la quatrième (Espagne 2024), elle a perdu après avoir pourtant ouvert le score.
Y a-t-il moins de prolongations s’il y a plus de buts ?
On pourrait penser qu’il y a un lien direct entre le nombre de buts marqués et encaissés par match à élimination directe et la probabilité de jouer des prolongations. En clair, plus ces matchs sont prolifiques en buts, plus les chances qu’ils se finissent en 90 minutes sont élevées. Ce n’est pas le cas.
Ainsi, en 1982, les Bleus ont marqué 5 buts et en ont encaissé 6 lors des deux matchs à élimination directe qu’ils ont disputés (demi-finale et troisième place. Soit 5,5 buts cumulés par match. Il y a pourtant eu prolongations et tirs au but contre la RFA. En 1984, le cumul demi-finale/finale est de 7 buts (3,5/match) avec là aussi une prolongation.
En 2006, il n’est que de 8 buts pour 4 rencontres (2/match) et il y a une seule prolongation, en finale. Alors qu’en 2016, il monte à 13 (3,25/match), avec aussi une seule prolongation, toujours en finale En 2021, les Bleus marquent 3 fois en un seul match à élimination directe et en 2022, 10 fois (2,5). On est loin du cas extrême (et caricatural) de l’Euro 1996 sans aucun but marqué en quart et en demi-finale, avec inévitablement des prolongations et des tirs au but.
Combien de prolongations pour les autres champions du monde et d’Europe ?
En Coupe du monde, en ne retenant que les éditions ayant compté au moins trois tours à élimination directe (deux seulement en 1930 et 1982, un seul en 1974 et 1978, aucun en 1950), il n’est arrivé que 7 fois que le champion du monde gagne tous ses matchs décisifs dans le temps réglementaire. Avant la France en 2018, il y a eu le Brésil en 1958, 1962, 1970 et 2002, l’Argentine en 1986 et l’Allemagne en 1954.
Pour 10 autres lauréats, il a fallu recourir aux prolongations, voire aux tirs au but : l’Italie cinq fois (deux fois en 2006, une en 1938 et deux en 1934), l’Allemagne à trois reprises (1990 et deux fois en 2014), la France et l’Argentine deux fois (en 1998 pour la première, en 2022 pour la seconde), l’Espagne (en 2010), le Brésil (en 1994) et l’Angleterre (en 1966).
Ces 15 prolongations ont débouché quatre fois sur des séances de tirs au but : en 1990 (Allemagne-Angleterre), en 1994 (la finale Brésil-Italie, la première de l’histoire sans but), en 1998 (France-Italie), en 2006 (Italie-France, encore en finale) et en 2022 (Argentine-Pays-Bas et Argentine-France). A noter qu’en 1934, les tirs au but n’existant pas, l’Italie-Espagne a été rejoué le lendemain après un 1-1 au bout des prolongations. L’Italie a remporté le second match 1-0.
Pour être complet, on mentionnera la seule fois où un champion du monde est allé en prolongations lors des cinq éditions non étudiées : la finale Argentine-Pays-Bas de 1978.
A l’Euro, en ne retenant que les éditions depuis 1996 avec là aussi au moins trois tours à élimination directe (quatre en 2016), la prédominance des prolongations est encore plus flagrante : sur 27 matchs disputés par les futurs champions d’Europe, seuls 13 se sont joués en 90 minutes. 14 ont nécessité des prolongations, dont 6 des tirs au but.