Sélectionneurs adverses : les Allemands, d’Otto Nerz à Rudi Völler

Publié le 15 septembre 2023 - Bruno Colombari

En 92 ans, lors de ses 33 oppositions contre l’Allemagne (ou la RFA entre 1952 et 1990), l’équipe de France n’a croisé la route que de neuf sélectionneurs différents. Il faut dire que la Mannschaft n’en a connu que onze, et seul Erich Ribbeck n’a jamais vu son équipe rencontrer les Bleus.

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Le plus assidus des sélectionneurs allemands adversaires de l’équipe de France est évidemment Joachim Löw, qui sera resté en poste pendant le plus grand nombre de matchs (197 entre 2006 et 2021). Il aura rencontré les Bleus neuf fois durant cette période, dont huit confrontations avec Didier Deschamps ! Battu par les Bleus de Laurent Blanc en février 2012 à Brême (avec un but d’Olivier Giroud), il prend le dessus sur Didier Deschamps un an plus tard à Saint-Denis, puis à Rio en juillet 2014 en quart de finale de la Coupe du monde. Il est d’ailleurs le seul sélectionneur à avoir battu deux fois les Bleus de Didier Deschamps, ce qui n’est pas rien. Mais ce dernier lui a fait payer cher : depuis, l’équipe de France a remporté quatre matchs sur six, dont trois en compétition : la demi-finale de l’Euro à Marseille en juillet 2016, un match de Ligue des Nations à Saint-Denis en octobre 2018 et le match de l’Euro à Munich en juin 2021. Ajoutez à ça deux nuls en Allemagne en 2017 et 2018, et vous comprendrez lequel des deux a pris le dessus, même si les deux hommes sont très proches. Le 13 novembre 2015, alors que des attentats créaient la panique dans Paris, les Allemands étaient restés dans les vestiaires du Stade de France en compagnie des joueurs français.

Un sélectionneur a duré plus longtemps que Löw, c’est Sepp Herberger. Adjoint du sympathisant nazi Otto Nerz dans les années 1930, dont le bilan contre le France est à l’équilibre (0-1 en 1931, 3-3 en 1933 et 3-1 en 1935), Herberger lui succède après les JO de Berlin en 1936. Il rencontre l’équipe de France une fois avant-guerre en 1937 à Stuttgart dans une ambiance irrespirable (victoire allemande 4-0) et la retrouve quinze ans plus tard, en 1952. Mais ce n’est plus la même histoire : les Français l’emportent 3-1 à Colombes pour les débuts de Raymond Kopa et enchaînent avec deux brillants succès contre les nouveaux champions du monde, en octobre 1954 à Hanovre (avec la dernière sélection de Larbi Ben Barek) et en juin 1958 à Göteborg, pour la troisième place du Mondial suédois (6-3). Le sélectionneur allemand a pour l’occasion fait jouer ses remplaçants, en se privant de Fraitz Walter et Une Seeler. Les deux matchs suivants se terminent par un score de parité (2-2) en octobre 1958 et en octobre 1962.


 

Avec Helmut Schön, qui succède à Herberger en 1964, les résultats français seront moins bons : cuisante défaite à Berlin en 1967 où réduits à dix après l’expulsion de Robert Péri, les Bleus encaissent quatre buts en une demi-heure (1-5) sous les ordres de Louis Dugauguez qui vient d’être nommé sélectionneur. Ils feront beaucoup mieux un an plus tard à Marseille (1-1), avant de s’incliner à nouveau en 1973 à Gelsenkirchen (1-2, doublé de Gerd Müller) avec Stefan Kovacs. Il faudra attendre février 1977 et la dernière sélection de Franz Beckenbauer pour voir les gamins de Michel Hidalgo l’emporter enfin au Parc (1-0).


 

Jupp Derwall, qui prend en charge la Mannschaft de 1978 à 1984, fera lui aussi mal aux Bleus : en novembre 1980 il les fait tourner en bourrique à Hanovre (1-4) avec ses champions d’Europe Schumacher, Kaltz, Briegel ou Hrubsech. Vingt mois plus tard à Séville, Michel Hidalgo croit bien tenir sa revanche en demi-finale de Coupe du monde quand ses Bleus mènent 3-1 en prolongation. Mais l’Allemand l’emporte au coaching en faisant entrer Rummenigge (buteur) et Hrubsech (passeur décisif) alors que les Bleus one eu recours à deux défenseurs (Battiston puis Lopez) pour remplacer Bernard Genghini. Hidalgo aura sa revanche en amical, en avril 1984 à Strasbourg (1-0), un peu tard. C’est l’une des 11 défaites de Derwall (en 67 matchs dirigés), l’avant-dernière : il sera débarqué à la suivante contre l’Espagne à l’Euro.

Habitué des oppositions contre la France (qu’il a rencontré quatre fois), Franz Beckenbauer n’est pas inquiet avant la demi-finale de Guadalajara, le 25 juin 1986. Il affronte des Bleus d’Henri Michel bouillis par leur extraordinaire match contre le Brésil quatre jours plus tôt, et sait ce qu’il faut faire pour les contrarier. Il parviendra à ses fins (0-2) par un marquage individuel strict, quitte à mettre la semelle si nécessaire. Un but chanceux de Brehme sur coup franc obligeait les Bleus à courir après le score, Rudi Völler portant le coup de grâce en toute fin de match. Un an plus tard à Berlin, le même Völler assommera l’équipe de France post-Platini de deux buts d’entrée (4e et 9e) même si Cantona, qui fait ses débuts, réduit le score (1-2). C’est finalement Michel Platini sélectionneur qui aura le dessus lors d’un amical en février 1990 à Montpellier, où Blanc entre en position de libéro en deuxième mi-temps (2-1). C’est la première défaite depuis l’Euro 1988 des futurs champions du monde.


 

Berti Vogts, qui remplace Beckenbauer après la Coupe du monde en Italie, attendra juin 1996 pour rencontrer l’équipe de France d’Aimé Jacquet. C’est en amical à Stuttgart juste avant l’Euro, et les Bleus l’emportent (1-0). Une performance, car Vogts ne perdra que 12 de ses 102 matchs en tant que sélectionneur. Mais c’est lui qui sera champion d’Europe à Wembley un mois plus tard.

Rudi Völler succède à Erich Ribbeck après le fiasco allemand à l’Euro 2000 (élimination au premier tour). Mais il chutera deux fois contre les Bleus, ceux de Roger Lemerre en février 2001 (1-0) et ceux de Jacques Santini en novembre 2003 (3-0) au terme d’une extraordinaire démonstration de technique et de vitesse à Gelsenkirchen. Mais ni Völler ni Santini n’iront plus loin que l’Euro 2004 au Portugal, qui sera un échec pour les deux. Völler assurera un bref intérim en septembre 2023 après le limogeage d’anti Flick et avant l’arrivée de Julian Nagelsmann. Il en profitera pour prendre sa revanche avec une victoire inattendue en amical (2-1), la première à domicile contre les Bleus depuis 1987 (où il avait d’ailleurs inscrit un doublé).

Pendant les deux ans du mandat de Jürgen Klinsmann, chargé de préparer la Coupe du monde 2006 à domicile, il n’y aura qu’un seul France-Allemagne. Joué en novembre 2005 trois jours après un voyage des Bleus en Martinique, il ne donne rien (0-0). C’est le seul match que Raymond Domenech disputera en tant que sélectionneur contre l’Allemagne.

Ils ont joué contre l’équipe de France

Franz Beckenbauer quatre fois en 1967, en 1968 (contre Aimé Jacquet et Roger Lemerre), en 1973 (contre Henri Michel) et en 1977 (contre Michel Platini)
Rudi Völler deux fois en 1986 (contre Michel Platini) et 1987
Berti Vogts deux fois en 1968 (contre Aimé Jacquet et Roger Lemerre) et en 1977 (contre Michel Platini)
Jürgen Klinsmann une fois en 1996 (contre Laurent Blanc et Didier Deschamps)

sélectionneurs allemandsJGNPdébutfinsélectionneurs français
Rudi Völler 1 1 0 0 2023 2023 Didier Deschamps
Joachim Löw 9 2 2 5 2012 2021 Didier Deschamps (8), Laurent Blanc
Jürgen Klinsmann 1 0 1 0 2005 2005 Raymond Domenech
Rudi Völler 2 0 0 2 2001 2003 Roger Lemerre, Jacques Santini
Berti Vogts 1 0 0 1 1996 1996 Aimé Jacquet
Franz Beckenbauer 3 1 1 1 1986 1990 Henri Michel (2), Michel Platini
Jupp Derwall 3 1 1 1 1980 1984 Michel Hidalgo (3)
Helmut Schön 4 2 1 1 1967 1977 Louis Dugauguez (2), Stefan Kovacs, Michel Hidalgo
Sepp Herberger 6 1 2 3 1937 1962 comité de sélection
Otto Nerz 3 1 1 1 1933 1935 comité de sélection

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