Que sont devenus les maillots historiques des Bleus ?

Publié le 6 novembre 2020 - Matthieu Delahais

Pour les joueurs, c’est sans doute le maillot ultime. Celui qui se mérite, qui est préparé, mais que tous n’ont pas la chance de porter en match. Mais une fois les rencontres terminées, que deviennent les maillots des Bleus ? Quelques exemples avec des pièces historiques.

4 minutes de lecture

C’est au musée Louis Nicollin qu’on trouverait les plus anciennes pièces : les deux maillots portés par Ernest Gravier lors des Jeux Olympiques de 1924. Le musée du sport a en sa possession une tenue d’Edmond Delfour lors du France-Angleterre de 1931. Celle de Just Fontaine lors de la Coupe du monde 1958 est partie lors d’une vente aux enchères pour 45 000 euros. Bernard Boissier, longtemps recordman de la carrière internationale la plus courte (1 sélection, 2 minutes sur le terrain), a offert son unique maillot Bleu à son beau-père. Tout l’inverse de Didier Deschamps, un temps le joueur le plus capé de l’équipe de France, qui a gardé précieusement beaucoup des siens, notamment ceux avec lesquels il a remporté des titres.

Si les pièces anciennes sont très rares, les maillots portés lors des dernières décennies sont plus faciles à trouver et certains ont une belle histoire.

Le maillot martyr

Lorsqu’il rentre sur la pelouse à la place de Bernard Genghini ce 8 juillet 1982, Patrick Battiston ne sait pas que dix minutes plus tard il quittera le terrain sur une civière. Mis KO par le portier allemand, Harald Schumacher, il devient le martyr français de la nuit maudite de Séville (après avoir mené 3-1 à la 98e minute, les Français se font rejoindre et s’inclinent aux tirs au but). Le maillot (numéro 3) qu’il porte ce soir-là va connaître alors un drôle de parcours avant de revenir 28 ans plus tard à son propriétaire légitime.

Evacué vers un hôpital de Séville, le Français est pris en charge un par médecin de garde, Rogelio Arias, qui rassure vite son patient. Il ne souffre d’aucune blessure grave. Pour le remercier, Battiston lui offre son maillot. Arias, proche du président du Séville FC, en fait un don au musée du club où la tenue, lavée et encadrée, va prendre place plus d’un quart de siècle. Le 4 mars 2008, Michel Platini, l’un de acteurs de cette nuit maudite et devenu depuis président de l’UEFA, se rend dans la capitale andalouse pour un match de Ligue des champions. Il découvre le maillot avec beaucoup d’émotion lors de son passage au musée qui décide de lui offrir. Le président de l’UEFA, grand ami de Battiston, l’offre à l’un des fils de son ancien partenaire.

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Le maillot maudit

17 novembre 1993, le jour maudit du football français. La Bulgarie vient de se qualifier pour la Coupe du monde au détriment des Bleus grâce à un but inscrit à la toute dernière minute. Alors que David Ginola, futur bouc émissaire du sélectionneur, quitte le terrain la tête basse, Emil Kremenliev s’en rapproche et lui demande en anglais son maillot « change, change ». Le regard perdu dans le vide, le numéro 15 des Bleus le lui tend et quitte la pelouse comme un zombie.
Le Bulgare offre ce maillot à son grand ami Kiril Kolarov, grand fan du joueur français.

Depuis la tenue a perdu de ses couleurs au fil des lavages. Le numéro a disparu, mais sur le cœur, le coq et son cartouche marqué « France Bulgarie 17-11-93 » est toujours présent. Ginola est devenu le surnom de Kiril pour les amis avec lesquels il joue au foot. Pour rien au monde il ne vendrait cette précieuse relique. Et il refuse aussi de l’afficher dans son bar, sous son cadre de verre, de peur qu’il n’attire les convoitises…

Le maillot du roi David

En 2011, Olivier Démolis, un collectionneur de maillots, retrouve sur Internet celui qu’avait David Trezeguet lors de la finale de la Coupe du monde 1998 (même si l’avant-centre n’a pas participé à cette rencontre). Après quelques tractations avec le vendeur brésilien, il réussit à négocier le prix à 7 350 euros auxquels s’ajoutent un maillot d’Anelka et un de Grichting. Dès qu’il est informé de l’arrivée de son colis, Olivier Démolis va le récupérer au bureau de poste, mais on l’informe qu’il a été saisi par la douane. Après avoir contacté les services douaniers, il apprend que son maillot a été détruit, car il s’agissait d’un faux.

« Sur le coup, je suis devenu fou. C’est une pièce historique qui appartenait au patrimoine français. C’est comme un tableau de Picasso que l’on ferait disparaître. Son fabricant, Adidas, l’a authentifié grâce à un numéro de série figurant sur le col. Et Valeria Gouvêa, le célèbre collectionneur brésilien qui me l’a vendu, est réputé pour son sérieux. Trezeguet avait échangé ce maillot à la fin de la finale avec le joueur brésilien Junior Baiano. »

Le collectionneur a intenté une action en justice pour essayer d’obtenir réparation. Il a contacté le président de la Fédération, le président de la République mais aussi David Trezeguet. Au final, le tribunal s’est déclaré incompétent pour rendre un jugement. Olivier Démolis a écrit un livre pour raconter son histoire (Cousue de fil bleu, Edilivre), mais n’est pas si malheureux pour autant. Il a réussi à acquérir par la suite deux des maillots portés lors de la finale de la Coupe du monde 1998, celui de Christian Karembeu et celui d’un certain Zinédine Zidane.

Le maillot béni

C’est en 2016, qu’Olivier Démolis a réussi à acquérir l’un des maillots de la finale du numéro 10 des Bleus. Il a fait authentifier cette pièce par les experts d’Adidas qui lui ont bien confirmé qu’il s’agissait d’un vrai, sans toutefois pouvoir dire si c’est celui avec lequel le Français avait marqué. D’après les recherches du collectionneur, chaque joueur aurait eu entre trois et cinq maillots lors de la finale. Zidane en aurait offert un an à son frère et un à Lizarazu. Le meneur de jeu des Bleus dit avoir jeté celui qu’il portait dans le public, mais les vidéos démentent ce dernier point puisque Zidane avait toujours son maillot lors de son retour aux vestiaires. Le maillot acquis par Olivier Démolis a été prêté pour 5 ans au musée de la FIFA à Zurich. Il resterait donc potentiellement deux maillots dans la nature.

L’une de ces tenues a failli être le plus bel objet d’une vente aux enchères en octobre 2018. C’est un habitant d’Aix-en-Provence qui possédait cette relique estimée à 40 000 euros minimum. Il l’aurait récupérée par sa belle-sœur, qui le tenait d’un des frères de Zidane. A la suite d’une séparation, un carton contenant ce maillot aurait été oublié. Son propriétaire voulait le vendre pour le mettre en valeur.

Mais quelques jours avant la vente, l’expert Jean-Marc Leynet, n’a pas pu l’authentifié comme étant bien celui avec lequel Zidane avait mis ses deux coups de tête. « Ce maillot est authentique. Pas de problème là-dessus. Il a bien été fabriqué pour la finale 1998. En revanche, je ne suis pas certain qu’il ait été porté. Je ne peux pas vous dévoiler le protocole détaillé qui m’a permis d’avoir ce doute mais il existe. Et ça change tout. Avec ce doute, je ne peux pas me permettre de le mettre en vente. C’est ma crédibilité d’expert qui est en jeu. »

Avis donc aux amateurs, il reste donc des maillots de Zidane dans la nature. Et aussi beaucoup d’autres, même s’ils n’ont pas le même prestige.

pour finir...

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Toujours disponible ! Un maillot, une légende de Matthieu Delahais et Bruno Colombari (Solar).

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