Les stats des Bleus en match à élimination directe

Publié le 4 juin 2025 - Bruno Colombari, Matthieu Delahais - 1

Lors des Jeux olympiques de 1908, la France a joué les deux premiers matchs à élimination directe de son histoire. Depuis, 61 autres rencontres de ce type ont eu lieu. Voyons ce que l’histoire des Bleus nous apprend à ce sujet.

Mise à jour d’un article initialement paru en septembre 2021.
6 minutes de lecture

Il faut tout d’abord reconnaître que les statistiques sont plutôt positives. La France a remporté 41 rencontres pour 22 défaites, en y intégrant 9 matchs nuls. Les rencontres où les équipes n’ont pu se départager se sont joués aux tirs au but et le récent quart de finale gagné contre le Portugal à l’Euro 2024 a rééquilibré les stats pour les Bleus (4 succès [Brésil 1986, Pays-Bas 1996, Italie 1998 et Portugal 2024] pour 5 échecs [RFA 1982, République tchèque 1996, Italie 2006, Suisse 2021] et Argentine 2022). En 54 rencontres, l’équipe de France est donc passée 41 fois et a été éliminée 22 fois (65% de réussite).

La différence de but est positive (123 marqués, contre 110 encaissés). Mais les deux premiers matchs perdus face aux Danois (0-9 et 1-17) en 1908 [1] ont engendré un déficit de 25 buts. Cet écart est monté à 26 au terme des jeux olympiques d’Anvers avant de décroitre progressivement. Il est passé dans le vert pour la première fois après la victoire en demi-finale de l’Euro face à l’Allemagne (2-0) avant que le Portugal ne le ramène à zéro lors de la finale. C’est donc lors de la campagne victorieuse en Russie que les Bleus ont enfin fait basculer cette statistique du bon côté. La Coupe du monde 1998 fut également un succès dans les statistiques des matches à élimination directe. La victoire contre le Brésil était la 13e dans ce type de rencontres, alors que la France avait à ce moment concédé 12 défaites.

  • La colonne « fin » précise comment s’est terminé un match nul à la fin du temps réglementaire : prolongations (p), but en or (beo) ou tirs au but (tab).

Les 63 matchs à élimination directe depuis 1908

# catégorie date ville adversaire score
915 Euro 2024 df 09/07/2024 Munich* Espagne 1-2
914 Euro 2024 qf 05/07/2024 Hambourg* Portugal 0-0 (5-3 tab)
913 Euro 2024 hf 01/07/2024 Düsseldorf* Belgique 1-0
895 CM 2022 fn 18/12/2022 Lusail* Argentine 3-3 (2-4 tab)
894 CM 2022 df 14/12/2022 Al-Khor* Maroc 2-0
893 CM 2022 qf 10/12/2022 Al-Khor* Angleterre 2-1
892 CM 2022 hf 04/12/2022 Doha* Pologne 3-1
878 LN 2021 fn 10/10/2021  Milan*  Espagne 2-1
877 LN 2021 df 07/10/2021  Turin*  Belgique 3-2
873 Euro 2020 hf 28/06/2021  Bucarest*  Suisse 3-3 (4-5 tab)
 839 CM 2018 fn 15/07/2018  Moscou* Croatie 4-2
838  CM 2018 df 10/07/2018 Saint-Petersbourg *  Belgique 1-0
837  CM 2018 qf 06/07/2018  Nijni-Novgorod *  Uruguay 2-0
836 CM 2018 hf 30/06/2018 Kazan* Argentine 4-3
810 Euro 2016 fn 10/07/2016 Saint-Denis Portugal 0-1 (prol)
809 Euro 2016 df 07/07/2016 Marseille Allemagne 2-0
808 Euro 2016 qf 03/07/2016 Saint-Denis Islande 5-2
807 Euro 2016 hf 26/06/2016 Lyon Rep. d’Irlande 2-1
783 CM 2014 qf 04/07/2014 Rio de Janeiro* Allemagne 0-1
782 CM 2014 hf 30/06/2014 Brasilia* Nigéria 2-0
756 Euro 2012 qf 23/06/2012 Donetsk* Espagne 0-2
678 CM 2006 fn 09/07/2006 Berlin* Italie 1-1 (3-5 tab)
677 CM 2006 df 05/07/2006 Munich* Portugal 1-0
676 CM 2006 qf 01/07/2006 Francfort* Brésil 1-0
675 CM 2006 hf 27/06/2006 Hanovre* Espagne 3-1
650 Euro 2004 qf 25/06/2004 Lisbonne* Grèce 0-1
636 Conf 2003 fn 29/06/2003 Saint-Denis Cameroun 1-0 (prol)
635 Conf 2003 df 26/06/2003 Saint-Denis Turquie 3-2
610 Conf 2001 fn 10/06/2001 Yokohama Japon 1-0
609 Conf 2001 df 07/06/2001 Suwon* Brésil 2-1
596 Euro 2000 fn 02/07/2000 Rotterdam* Italie 2-1 (prol)
595 Euro 2000 df 28/06/2000 Bruxelles* Portugal 2-1 (prol)
594 Euro 2000 qf 25/06/2000 Bruges* Espagne 2-1
569 CM 1998 fn 12/07/1998 Saint-Denis Brésil 3-0
568 CM 1998 df 08/07/1998 Saint-Denis Croatie 2-1
567 CM 1998 qf 03/07/1998 Saint-Denis Italie 0-0 (4-3 tab)
566 CM 1998 hf 28/06/1998 Lens Paraguay 1-0 (prol)
544 Euro 1996 df 26/06/1996 Manchester* Rep. Tchèque 0-0 (4-5 tab)
543 Euro 1996 qf 22/06/1996 Liverpool* Pays-Bas 0-0 (5-4 tab)
457 CM 1986 3p 28/06/1986 Puebla* Belgique 4-2 (prol)
456 CM 1986 df 25/06/1986 Guadalajara* Allemagne 0-2
455 CM 1986 qf 21/06/1986 Guadalajara* Brésil 1-1 (4-3 tab)
454 CM 1986 hf 17/06/1986 Mexico* Italie 2-0
445 Interc. 1985 fn 21/08/1985 Paris (Parc) Uruguay 2-0
439 Euro 1984 fn 27/06/1984 Paris (Parc) Espagne 2-0
438 Euro 1984 df 23/06/1984 Marseille Portugal 3-2 (prol)
420 CM 1982 3p 10/07/1982 Alicante* Pologne 2-3
419 CM 1982 df 08/07/1982 Séville* Allemagne 3-3 (4-5 tab)
261 Euro 1960 3p 09/07/1960 Marseille Tchécoslovaquie 0-2
260 Euro 1960 df 06/07/1960 Paris (Parc) Yougoslavie 4-5
246 CM 1958 3p 28/06/1958 Göteborg* Allemagne 6-3
245 CM 1958 df 24/06/1958 Solna* Brésil 2-5
244 CM 1958 qf 19/06/1958 Norrköping* Irlande du Nord 4-0
149 CM 1938 qf 12/06/1938 Colombes Italie 1-3
148 CM 1938 hf 05/06/1938 Colombes Belgique 3-1
125 CM 1934 hf 27/05/1934 Turin* Autriche 2-3 (prol)
84 JO 1928 hf 29/05/1928 Amsterdam* Italie 3-4
61 JO 1924 qf 01/06/1924 Colombes Uruguay 1-5
60 JO 1924 hf 27/05/1924 Saint-Ouen Lettonie 7-0
43 JO 1920 df 31/08/1920 Anvers* Tchécoslovaquie 1-4
42 JO 1920 qf 29/08/1920 Anvers* Italie 3-1
12 JO 1908 df 22/10/1908 Londres* Danemark 1-17
11 JO 1908 qf 19/10/1908 Londres* Danemark 0-9

Regardons maintenant les scores en les étudiant selon deux axes : les buts encaissés en ordonnées (lignes), puis les buts marqués en absisses (colonnes).

buts012 3 4567Totalqualifélimtaux
0 4 8 6 1 1 1 21 20 1 95 %
1 3 2 8 4 17 13 4 76%
2 3 1 3 2 1 10 6 4 60 %
3 1 2 3 1 1 8 2 6 25 %
4 1 1 2 2 0 %
5 1 1 1 3 3 0 %
9 1 1 1 0 %
17 1 1 1 0 %
total 11 15 17 12 5 1 1 1 63 41 22 65 %
qualif 3 9 14 8 4 1 1 1 41
élim 8 6 3 4 1 22
taux 27 % 60 % 82 % 66 % 80 % 100 % 100 % 100 % 65 %

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Une clean sheet ne qualifie pas toujours, mais presque

On constate tout d’abord qu’encaisser aucun but ne garantit pas systématiquement une qualification, mais presque (20 victoires et une élimination). Lors de la demi-finale de l’Euro 1996 la défense française avait été imperméable, mais comme l’attaque bleue était également restée muette, les choses se sont jouées aux tirs au but sans réussite. Encaisser un but débouche quatre fois sur 17 sur une élimination (dont deux aux tirs buts), alors que deux pris entrainent quatre éliminations pour six qualifications. Au global, encaisser deux buts ou moins permet aux Français de passer 4 fois sur 5 (39 qualifications en 48 matches).

C’est à partir de trois buts encaissés que les choses se compliquent sérieusement. Si la France a remporté la petite finale de la Coupe du monde 1958 en concédant trois buts (victoire 6-3), elle est également passée plus récemment face à l’Argentine avec la même friabilité défensive (4-3). Mais à six autres occasions, les trois ballons que le gardien français est allé chercher au fond de ses filets ont été synonyme d’élimination. Pour le reste, quatre buts encaissés (à deux occasions) ou plus (5 buts par trois fois, 9 et 17 à une occasion) entrainent toujours une fin de parcours.

Côté buts marqués, il suffit d’en réussir un minimum de cinq pour se qualifier à coup sûr. Mais ce cas s’est produit à trois occasions seulement. L’une est assez récente (quart de finale de l’Euro 2016 gagné 5-2 face à l’Islande) mais les deux autres remontent à beaucoup plus loin (6-3 contre la RFA en 1958, 7-0 face à la Lettonie en 1924). Assez étrangement, quatre buts ne sont pas toujours suffisants pour passer. Les Français ont ainsi été défaits par la Yougoslavie en demi-finale de l’Euro 1960 avec pourtant beaucoup de réussite de la part de leur attaque (échec 4-5). Mais les quatre autres matchs avec quatre buts marqués ont permis aux Bleus de poursuivre leur aventure.

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Qualifiés huit fois sur dix en marquant deux buts

On pourrait penser que plus le nombre de buts est faible, moins le taux de réussite est élevé, mais ce n’est pas le cas. Ainsi les Bleus sont passés 8 fois sur 12 en ayant marqué trois buts (avec trois échecs aux tirs au but) soit un taux de réussite de 66%. Mais ce chiffre monte à 82% avec seulement deux buts réussis (14 qualifications pour 3 échecs). Les choses se compliquent ensuite avec 62% de réussite avec un but marqué (9 qualifications en 15 matches) et quand même 27% de succès sans marquer de buts (qualifications aux tirs au but face aux Pays-Bas en 1996, contre l’Italie en 1998 et face au Portugal en 2024, pour huit échecs).

A noter pour finir que si la demi-finale a longtemps été un obstacle difficilement surmontable pour les Bleus (cinq échecs en 1958, 1960, 1982, 1986 et 1996 pour un seul succès en 1984), les choses se sont beaucoup améliorées depuis 1998 (7 victoires en 1998, 2000, 2001, 2003, 2006, 2016 et 2018, pour un seul échec en 2024). Il serait toutefois sage de faire la décision avant les tirs au but puisque la France n’a jamais gagné dans ce type d’exercice aussi bien en demi-finale (1982, 1996) qu’en finale (2006, 2022), alors qu’elle l’a toujours emporté en quart (1986, 1996, 1998, 2024). Les taux de succès restent toutefois élevés dans les derniers carrés des grands tournois et vont croissant avec l’avancée dans la compétition. Les demi-finales voient la France passer dans 62% des cas (10 fois sur 16), taux qui monte à 66% lors des petites finales (2 sur 3) et 70% lors de l’ultime rencontre (7 sur 10).

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Ce qui se passe après l’ouverture du score

Voici une représentation en arborescence de l’évolution du score en fonction de l’équipe qui marque en premier. On voit que les Bleus ont ouvert le score 34 fois, contre 25 à l’adversaire (et 4 fois, il y a eu 0-0). A 1-0 pour la France, cette dernière l’emporte 7 fois sur ce score, et si elle marque un deuxième but, elle gagne 15 fois sur 16 (le seul contre-exemple étant la défaite contre l’Italie en 1920, 3-4). Si l’adversaire égalise, les Bleus se qualifient 7 fois sur 11.

A l’inverse, ils sont éliminés 16 fois sur 25 quand l’adversaire marque en premier, mais s’ils égalisent, ils l’emportent finalement 8 fois sur 14. En revanche, à 0-2 c’est presque toujours fatal (7 fois sur 8), avec là aussi une exception, la victoire contre la Belgique en 2021 (3-2).

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En conclusion, lors de matchs à élimation directe, les Bleus tirent souvent les premiers (34 fois sur 63) et encore aussi les deuxièmes (30 sur 49). Mais si marquer en premier permet la qualification dans 76% des cas, le fait d’égaliser ne garantit rien : qualification dans 48% des cas, élimination à 52%. En revanche, mener 2-0 assure la qualification dans 92% des cas.

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56 buteurs différents, Mbappé en tête

Sur les 123 buts marqués par l’équipe de France (dont trois CSC signés par le Nigérian Joseph Yobo en 2014, le Croate Mario Mandzukic en 2018 et le Belge Jan Vertonghen en 2024), les cinq premiers en ont inscrits 37, dont 10 en 14 matchs pour Kylian Mbappé. Ce dernier a marqué 21% de ses buts lors de matchs à élimination directe, un ratio très proche de ceux de Just Fontaine et Zinédine Zidane (23%). Curieusement, les deux meilleurs buteurs actuels de l’histoire des Bleus n’ont pas été efficaces dans ce type de match, avec 4 buts en 17 rencontres pour Olivier Giroud et 4 sur 13 pour Thierry Henry. Aucun n’a marqué en finale.

buteursbutsmatchsmoyennecfpen.doublétriplé+% buts
Kylian Mbappé * 10 14 0,71 0 3 2 1 21%
Antoine Griezmann 8 20 0,40 0 3 2 0 18%
Just Fontaine 7 3 2,33 0 0 1 1 23%
Zinédine Zidane 7 13 0,54 1 3 1 0 23%
Michel Platini 5 7 0,71 1 1 0 0 12%
Jean Boyer 4 4 1,00 0 0 1 0 57%
Paul Nicolas 4 5 0,80 0 0 1 0 20%
Karim Benzema 4 6 0,67 0 0 1 0 11%
Paul Pogba * 4 13 0,31 0 0 0 0 36%
Thierry Henry 4 13 0,31 0 0 0 0 8%
Olivier Giroud 4 17 0,24 0 0 1 0 7%
Edouard Crut 3 2 1,50 0 0 0 1 50%
Jean Nicolas 3 3 1,00 0 0 1 0 14%
Juste Brouzes 2 1 2,00 0 0 1 0 67%
Jean-François Domergue 2 2 1,00 1 0 1 0 100%
François Heutte 2 2 1,00 0 0 1 0 50%
Roger Piantoni 2 2 1,00 0 0 0 0 11%
Randal Kolo Muani * 2 5 0,40 0 0 0 0 25%
Maryan Wisniewski 2 5 0,40 0 0 0 0 17%
Robert Pirès 2 8 0,25 0 0 0 0 14%
Théo Hernandez * 2 9 0,22 0 0 0 0 100%
Patrick Vieira 2 10 0,20 0 0 0 0 33%
Sylvain Wiltord 2 11 0,18 0 0 0 0 8%
Lilian Thuram 2 16 0,13 0 0 1 0 100%
Jean-Pierre Papin 1 1 1,00 0 0 0 0 3%
José Touré 1 1 1,00 0 0 0 0 25%
René Girard 1 1 1,00 0 0 0 0 100%
Alain Couriol 1 1 1,00 0 0 0 0 50%
Georges Verriest 1 1 1,00 0 1 0 0 100%
Robert Dauphin 1 1 1,00 0 0 0 0 100%
Emile Sartorius 1 1 1,00 0 0 0 0 50%
Marius Trésor 1 2 0,50 0 0 0 0 25%
Yvon Douis 1 2 0,50 0 0 0 0 25%
Oscar Heisserer 1 2 0,50 0 0 0 0 13%
Emile Veinante 1 2 0,50 0 0 0 0 7%
Henri Bard 1 2 0,50 0 0 0 0 20%
Yannick Stopyra 1 3 0,33 0 0 0 0 9%
Bernard Genghini 1 3 0,33 0 0 0 0 17%
Raymond Kopa 1 3 0,33 0 1 0 0 6%
Dimitri Payet * 1 4 0,25 0 0 0 0 13%
Jean-Marc Ferreri 1 4 0,25 0 0 0 0 33%
Dominique Rocheteau 1 4 0,25 0 0 0 0 7%
Franck Ribéry 1 5 0,20 0 0 0 0 6%
Emmanuel Petit 1 5 0,20 0 0 0 0 17%
Jean Vincent 1 5 0,20 0 0 0 0 5%
Bruno Bellone 1 6 0,17 0 0 0 0 50%
Benjamin Pavard * 1 7 0,14 0 0 0 0 20%
Samuel Umtiti * 1 7 0,14 0 0 0 0 25%
David Trezeguet 1 7 0,14 0 0 0 0 3%
Manuel Amoros 1 7 0,14 0 1 0 0 100%
Alain Giresse 1 7 0,14 0 0 0 0 17%
Laurent Blanc 1 8 0,13 0 0 0 0 6%
Aurélien Tchouaméni * 1 9 0,11 0 0 0 0 33%
Youri Djorkaeff 1 10 0,10 0 0 0 0 4%
Raphaël Varane 1 13 0,08 0 0 0 0 20%
Marcel Desailly 1 13 0,08 0 0 0 0 33%

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