Rudi le voleur de rêves

Publié le 11 septembre 2023 - Richard Coudrais

Le retour inattendu (et provisoire) de Rudi Völler à la tête de l’équipe d’Allemagne ravive quelques souvenirs du côté des supporters de l’équipe de France.

4 minutes de lecture

Article mis à jour le 13 septembre 2023.

Dans l’imaginaire du football français, Rudi Völler devrait figurer parmi les briseurs de rêves au même titre que Kostadinov, Schumacher ou Rummenigge. Toutefois, l’attaquant allemand, qui a souvent marqué contre les Bleus, garde une image sympathique, notamment parce qu’il fait aussi partie des héros de l’OM de 1993.

1984 : un jeune bomber à la Meinau

Lorsqu’il joue pour la première fois contre l’équipe de France le 18 avril 1984 à Strasbourg, Rudolf Völler a vingt-quatre ans et fait le bonheur du Werder Brême. Cette rencontre à la Meinau est déjà la 14e sélection de sa carrière (pour 9 buts), alors qu’il n’a intégré la Nationalmannschaft que quinze mois plus tôt, en novembre 1982. Sur la pelouse alsacienne, Rudi Völler est aligné aux côtés du capitaine Karl-Heinz Rummenigge.

Le terrible duo d’attaque sera alors muet face à un Joël Bats qui n’en est lui qu’à sa sixième sélection. Les deux hommes se retrouveront. En s’imposant 1-0 sur un but de Genghini, la France prend alors sa revanche de Séville et les Bleus font savoir qu’ils convoitent très sérieusement le titre de champion d’Europe toujours détenu par les hommes de Jupp Derwall.

1986 : coup de poignard à Guadalajara

Si l’équipe de RFA a sombré lors de l’Euro 1984, Rudi Völler a surnagé. Il inscrit deux buts face à la Roumanie, et reste le seul buteur allemand de l’épreuve. Deux ans plus tard, c’est sans surprise qu’on le retrouve à la pointe de l’attaque de l’équipe allemande pour la Coupe du monde au Mexique. Titulaire aux côtés de Klaus Allofs lors des premiers matchs, il se montre peu performant à tel point que le sélectionneur Franz Beckenbauer le relègue sur le banc de touche.


 

Absent du quart de finale contre le Mexique, le remplaçant de luxe fait son retour à Guadalajara en demi-finale contre la France, où après une heure de jeu, il remplace le vieillissant Rummenigge. Ce 25 juin 1986, la RFA mène alors au score et contient les velléités d’une équipe de France qui puise dans ses dernières ressources pour égaliser. A la toute dernière minute, alors que les Français viennent de manquer une énième occasion, Schumacher relance vers Allofs, qui donne à Völler, lequel lobe Bats sorti de sa surface et s’en va pousser le ballon dans la cage vide. L’Allemand brise pour de bon le rêve d’une Coupe du monde pour la génération Platini.

Rudi Völler est également sur le banc pour la finale contre l’Argentine. II entre à la mi-temps à la place de Klaus Allofs et signe à neuf minutes de la fin le but d’une égalisation miraculeuse. Il n’empêchera toutefois pas l’Argentine de l’emporter 3-2. Il reste le troisième et dernier joueur entré en cours de jeu à marquer en finale de Coupe du monde, après le Néerlandais Nanninga (1978) et l’Italien Altobelli (1982).

1987 : Berlin express

Treize mois après Guadalajara, les deux sélections se retrouvent en août 1987 pour un match amical à Berlin. Beaucoup de choses ont changé de part et d’autre avec les départs de Platini et Rummenigge, de Bossis et Briegel, de Giresse et Magath… Rudi Völler, 27 ans, est toujours là. Il vient de quitter la Bundesliga pour l’AS Roma, dans l’eldorado italien. A Berlin, il retrouve Joël Bats à qui il inflige deux buts en moins de dix minutes (4’ et 9’). Il est le seul joueur à avoir inscrit trois buts au gardien français [1].


 

Triomphes à la Romaine

Rudi Völler aurait pu retrouver l’équipe de France en février 1990 à Montpellier pour une rencontre de préparation entre les Bleus de Platini et ceux de Beckenbauer. Mais le Romain doit déclarer forfait et assiste impuissant à la défaite (2-1) de son équipe. Cela n’empêchera toutefois pas la RFA, quatre mois plus tard, de devenir championne du monde, dans un stade romain où Rudi Völler a ses habitudes. Auteur de trois buts durant le tournoi, on se souvient surtout de son altercation avec Frank Rijkaard lors d’un houleux huitième de finale face aux Pays-Bas. En finale, c’est lui qui obtient non sans un certain savoir-faire le penalty qui donne la victoire aux siens.

Quelques mois plus tard, Rudi Völler vient à nouveau semer la terreur dans les surfaces de réparation françaises, à l’occasion d’un terrible huitième de finale de Coupe UEFA où l’AS Roma coule les Girondins de Bordeaux (5-0, 2-0) avec quatre buts de son insatiable allemand. Trois ans plus tard, son image de bourreau des Français sera quelque peu radoucie par sa participation active au triomphe de l’OM en Coupe d’Europe. Il est alors le coéquipier de sept internationaux français que, curieusement, il n’a jamais directement affrontés sous le maillot allemand [2].

Lorsqu’il quitte la sélection allemande à l’issue de la Coupe du monde 1994, Rudi Völler compte 90 sélections et quelques 47 buts, dont trois inscrits aux Bleus. Il se retire des terrains en 1996 et se lance dans une carrière d’entraîneur qui le conduit dès l’an 2000 à prendre en main la sélection nationale.

Le blues du sélectionneur

Rudi Völler retrouve alors l’équipe de France en deux occasions. Le 27 février 2001, il conduit son équipe au Stade de France où l’attend une équipe de France championne du monde et championne d’Europe, et dont le capitaine est son ancien coéquipier de l’OM, Marcel Desailly. L’équipe de Roger Lemerre s’impose 1-0 grâce à un but de Zinédine Zidane.

En novembre 2003, les deux équipes se retrouvent à Gelsenkirchen. L’une a perdu son titre de championne du monde, l’autre est parvenue en finale de la récente édition coréo-japonaise. Ce sont pourtant les hommes de Jacques Santini qui vont l’emporter (3-0), réalisant l’une des performances les plus remarquables de l’époque.

Le 12 septembre 2023, l’équipe de France affronte une équipe d’Allemagne en pleine crise. La Mannschaft additionnent les défaites et le 4-1 concédé face au Japon à Wolfsbourg provoque le licenciement son sélectionneur Hansi Flick, deux jours avant de recevoir la France à Dortmund. Rudi Völler reprend alors du service. Ses hommes dominent (2-1) ceux de son ancien coéquipiers marseillais Didier Deschamps et enrayent la spirale de l’échec. Rudi Völler permet de reprendre la main dans son bilan personnel face à l’équipe de France.

Six rencontres, trois victoires, trois défaites, trois buts

Rudi Völler a disputé six rencontres contre l’équipe de France. En tant que joueur, il a inscrit trois buts en 170 minutes et compte deux victoires pour une défaite. Comme sélectionneur, il compte deux défaites et une victoire.

JoueurMatchDateLieuEquipeScoreTpsJeuNotes
14 Amical 18/04/1984 Strasbourg RFA 1-0 90
36 CM 1/2 25/06/1986 Guadalajara RFA 0-2 > 33 1 but (90’)
42 Amical 12/08/1987 Berlin RFA 1-2 47 > 2 buts (4’ & 9’)
SélectionneurMatchDateLieuEquipeScore
Amical 27/02/2001 Saint-Denis Allemagne 1-0
Amical 15/11/2003 Gelsenkirchen Allemagne 3-0
Amical 12/09/2023 Dortmund Allemagne 1-2

pour finir...

La rédaction de cet article a nécessité la consultation des sites selectiona.free.fr, L’Équipe, FFF, Wikipédia, la relecture d’anciens exemplaires de France-Football, L’Équipe, les Cahiers de L’Équipe, ainsi que « L’intégrale de l’équipe de France de football » de Pierre Cazal, Jean-Michel Cazal et Michel Oreggia (First édition, 1998), les éditions 1984 à 1993 de « L’année du football » de Jacques Thibert (Calmann-Levy) et du « Livre d’or du football » de Charles Biétry (Solar).

[1Sur les 37 buts concédés par Joël Bats durant ses 50 sélections en équipe de France, quatre adversaires ont signé un doublé : Rudi Völler, le Danois Michaël Laudrup, le Portugais Jordao et plus tard l’Ecossais Mo Johnston. Les autres joueurs à lui avoir inscrit un but sur deux rencontres différentes sont le Soviétique Vassily Rats, le Yougoslave Dragan Stojkovic, l’Allemand de l’Est Rainer Ernst... et Rudi Völler.

[2Parmi les titulaires de la finale de Munich figuraient Barthez, Boli, Desailly, Angloma, Di Meco, Deschamps et Sauzée, qui n’ont jamais joué contre Völler en sélection. En revanche, Manuel Amoros, présent dans l’effectif de l’OM 1992/1993, a été présent dans les trois équipes de France que Völler a croisé dans sa carrière de joueur. Quand à Jean-Marc Ferreri, il est entré en jeu pour le France-RFA de 1984 à Strasbourg.

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