Monaco 1978-1982, les années Mundial

Publié le 25 juillet 2025 - Richard Coudrais

Les équipes historiques du championnat de France ont-elles eu une influence sur la sélection nationale ? Tentative de réponse avec l’AS Monaco champion de France en 1978 et 1982.

6 minutes de lecture

L’AS Monaco a pour particularité d’avoir remporté deux de ses titres l’année d’une Coupe du monde, en 1978 et en 1982. Il semble dès lors intéressant de mesurer l’impact de ces titres sur la composition de l’équipe de France lors des tournois en Argentine et en Espagne.

Un promu champion de France

Parmi les huit titres de champion de France conquis par l’AS Monaco, celui de 1978 tient une place à part. C’est un titre attendu depuis quinze ans mais un titre tout aussi inattendu puisqu’il est conquis alors que le club de la Principauté vient tout juste de remonter en première division. Seul Saint-Étienne, en 1964, avait réussi un exploit comparable. Et depuis, aucun autre promu n’a décroché le titre de champion national.

Lorsque l’ASM revient en première division en 1977, il compte trois anciens internationaux dans son effectif : le gardien Yves Chauveau (32 ans, une sélection en 1969), le défenseur Albert Vannucci (30 ans, deux sélections en 1974) et l’attaquant Christian Dalger (28 ans, une sélection en 1974). Ils sont rejoints par le défenseur Bernard Gardon (26 ans, une sélection en 1973) en provenance de Lille.

Michel Hidalgo, le sélectionneur de l’équipe de France, n’est pas insensible au retour parmi l’élite du club où il a vécu les meilleures années de sa carrière de joueur. Dès le début de la saison, à l’occasion du match de rentrée des Bleus contre le club allemand de Hambourg, il fait appel à Christian Dalger dont il ne tarit pas d’éloges, le préférant au poste d’ailier droit au jeune Rocheteau. L’attaquant monégasque entre à l’heure de jeu à la place du Nantais Pécout.


 

Deux Monégasques en Argentine

Un mois plus tard, Dalger est rappelé lors du match amical contre l’URSS au Parc des Princes en même temps que son coéquipier Jean Petit, dont c’est la première sélection, à vingt-huit ans. Le sélectionneur fait appel à d’autres Monégasques durant cette saison 1977/1978, mais seulement pour l’équipe de France B : Bernard Gardon, Alain Moizan, Claude Vitalis et le gardien Jean-Luc Ettori, devenu titulaire à Monaco après la blessure d’Yves Chauveau.

Au bout du compte, seuls Dalger et Petit sont du voyage en Argentine pour la Coupe du monde en juin 1978. Le premier joue contre l’Italie (1-2) et le second contre la Hongrie (3-1), où Hidalgo fait jouer ses remplaçants.

Jean Petit devient titulaire chez les Bleus lors de la saison 1978/1979. Il participe à cinq des six rencontres de la saison au milieu de terrain. De son côté Monaco s’est renforcé avec deux internationaux, Gérard Soler (deux sélections) et Albert Emon (cinq), qui ont pour points communs d’avoir vingt-quatre ans, de n’avoir plus été appelé depuis 1976 et de retrouver un nouveau souffle au pied du Rocher. Le premier est rappelé pour le match amical contre l’Espagne (1-0) au Parc en novembre 1978 et le second pour deux rencontres éliminatoires de l’Europeo 1980 contre le Luxembourg (3-0) et en Tchécoslovaquie (0-2). Soler quittera l’ASM dès la fin de la saison pour rejoindre Bordeaux.

Moizan et Christophe, Monégasques de passage

Lors de la saison suivante, en 1979/1980, de nouveaux joueurs monégasques apparaissent en équipe de France. Alain Moizan fait ses débuts en Bleu à l’occasion du match UNFP contre le Bayern Munich (4-1). Il a vingt-cinq ans et joue à l’ASM depuis 1977. Quinze jours plus tard, il est du déplacement en Suède mais alors qu’il n’est pas annoncé dans le onze de départ, il est finalement titulaire en lieu et place d’Henri Michel qui s’est blessé à l’échauffement. C’est sa première sélection, qui sera suivie de deux autres contre les Etats-Unis (3-0) et la Tchécoslovaquie (2-1).

En février 1980 face à la Grèce (5-1) apparaissent le milieu de terrain Didier Christophe, vingt-trois ans, et le gardien de but Jean-Luc Ettori, vingt-quatre ans. Leur parcours est très similaire puisqu’ils proviennent tous deux de l’INF Vichy et qu’ils ont rejoint Monaco à l’âge de vingt ans. Le premier nommé, bien que déjà présent au club, n’avait participé à aucun match du titre de 1978. Contre les Grecs, il joue soixante-dix minutes avant de céder sa place à un autre joueur qui fait également ses débuts, Bernard Genghini (un futur Monégasque). Jean-Luc Ettori quant à lui remplace Dominique Dropsy à la mi-temps et préserve sa cage inviolée.


 

Didier Christophe est rappelé un mois plus tard pour la rencontre amicale face aux Pays-Bas (0-0) en compagnie d’un autre Monégasque, l’attaquant Alain Couriol, vingt-et-un ans, issu lui aussi de l’INF Vichy et arrivé en Principauté en 1979. Les deux hommes sont à nouveau présents deux mois plus tard à Moscou pour le dernier match de la saison contre l’URSS (0-1) avec un troisième coéquipier, Albert Emon, qui n’avait plus été appelé depuis un an. C’est d’ailleurs Couriol qui le remplacera à la mi-temps.

L’AS Monaco remporte la Coupe de France 1980 et reste l’un des meilleurs clubs français. Au début de la saison 1980/1981, le club de la Principauté voit partir Gardon et Moizan pour Lille et Lyon. Pour le premier match de la saison contre la Juventus au Parc, Michel Hidalgo fait appel à Didier Christophe et Jean Petit, le premier cédant sa place au second à la mi-temps. Jean Petit, toujours performant à trente ans, est également appelé lors des rencontres éliminatoires à Chypre (7-0) et contre l’Irlande (2-0). Christophe quant à lui effectue son retour au début de l’année pour les rencontres en Espagne (0-1) et aux Pays-Bas (0-1).

Amoros, Bellone et Couriol, prometteuse génération

En cette saison 1980/1981, le sélectionneur penche plutôt pour l’AS Saint-Etienne, futur champion de France, alors que l’AS Monaco est représenté en Bleu à la même échelle que Nantes, Bordeaux, Strasbourg ou Sochaux, autres fournisseurs habituels de l’équipe nationale. En attendant leur tour, des joueurs comme Alain Couriol, Jean-Luc Ettori, Roger Ricort et Alfred Vitalis rongent leur frein en équipe de France B.

Au début de la saison 1981/1982, Albert Emon quitte le club, remplacé par Eric Pécout. L’ancien Nantais compte, à vingt-cinq ans, cinq sélections et il est le seul Monégasque aligné lors du match de début de saison contre Stuttgart (1-3). Deux mois plus tard, les Bleus se rendent en Irlande pour un match déjà décisif en vue de la qualification pour la Coupe du monde 1982. Didier Christophe et Alain Couriol sont rappelés pour l’occasion, de même que l’attaquant Bruno Bellone, dix-neuf ans, lequel pour sa première sélection marque son premier but (2-3).


 

Christophe ne sera plus jamais rappelé contrairement à Bellone qui participe au festival des Français contre Chypre (4-0) qui valide définitivement la qualification pour l’Espagne. Celui que Didier Roustan a surnommé Lucky Luke est le premier joueur issu du centre de formation monégasque appelé en équipe de France. Il est imité en février 1982 par Manuel Amoros, vingt ans, qui fait ses débuts contre l’Italie (2-0).

Quatre Monégasques en Espagne

L’AS Monaco domine le championnat de cette saison 1981/1982, à croire que l’imminence d’une Coupe du monde inspire le club de la Principauté. Contrairement à 1978, Michel Hidalgo cherche à profiter de la dynamique monégasque pour renforcer son équipe. A l’occasion des rencontres de préparation contre l’Irlande du Nord et le Pérou, le sélectionneur titularise trois joueurs de l’ASM : Amoros, Couriol et Bellone. Un quatrième s’ajoute à eux au mois de mai contre la Bulgarie, le gardien Jean-Luc Ettori. Alors qu’il célèbre le quatrième titre de son histoire, l’AS Monaco compte quatre joueurs dans le groupe des vingt-deux pour la Coupe du monde en Espagne. Bordeaux et l’AS Saint-Etienne en comptent toutefois six chacun.

Alors qu’il semblait voué au rôle de troisième gardien, Jean-Luc Ettori est titularisé dès le premier match contre l’Angleterre à Bilbao. Il encaisse son premier but dès la première minute alors qu’il n’en avait pas pris un seul lors de ses deux premières sélections. Il est le seul Monégasque du naufrage de San Mamès, mais malgré une partie moyenne, il échappe au remaniement effectué par le sélectionneur dès le deuxième match, contre le Koweït.

Celui-ci profite au jeune Manuel Amoros, lui aussi prévu comme remplaçant, mais qui va devenir l’une des grandes révélations du tournoi. Ettori et Amoros participent à l’épopée des Bleus jusqu’à la fameuse demi-finale de Séville. Alain Couriol entre en jeu lors du troisième match contre la Tchécoslovaquie, puis sera titularisé pour le match de la troisième place avec Amoros et Bellone, ce dernier n’ayant pas eu l’occasion de jouer précédemment.

En force à l’Euro

Les titres monégasques de 1978 et 1982 n’ont donc pas eu un fort impact sur les compositions de l’équipe de France lors des phases finales disputées en fin de saison. Si ce sont d’autres clubs qui comptent le plus grand nombre de sélectionnés dans les listes de 22, l’AS Monaco sera paradoxalement le club le plus représenté au sein de la sélection qui remportera le championnat d’Europe en 1984.

Il faut dire qu’au cours de l’été 1983, après une saison ratée, les dirigeants monégasques effectuent un gros recrutement en attirant notamment les internationaux Bernard Genghini, Yvon Le Roux, Daniel Bravo et Philippe Anziani. Les trois premiers disputeront l’Euro 1984 aux côtés de Amoros et Bellone, ce qui fera cinq monégasques champions d’Europe. Il leur manquera juste un titre de champion de France sous le maillot rouge et blanc…

Lorsque Henri Michel reprend l’équipe de France en septembre 1984, il aligne six Monégasques pour son premier match contre l’Inter Milan : Amoros, Bellone, Le Roux, Bravo, Bijotat et Anziani. Jamais l’on aura vu autant de Monégasques en Bleu que ce soir-là.

Les Monégasques en Bleu de 1978 à 1982

JoueurChampion en...Période MonacoPériode FranceSélections
Yves Chauveau 1978 1975-1978 1969-1969 0/1
Bernard Gardon 1978 1977-1980 1973-1973 0/1
Albert Vannucci 1978 1975-1978 1974-1974 0/2
Christian Dalger 1978 1971-1982 1974-1978 6/6
Jean Petit 1978 & 1982 1969-1982 1977-1980 12/12
Gérard Soler (aucun) 1978-1979 1974-1983 1/16
Albert Emon (aucun) 1978-1981 1975-1980 3/8
Alain Moizan 1978 1977-1980 1979-1979 3/7
Didier Christophe 1982 1976-1982 1980-1981 6/6
Jean-Luc Ettori 1978 & 1982 1975-1994 1980-1982 9/9
Alain Couriol 1982 1979-1983 1980-1983 11/12
Éric Pécout 1982 1981-1983 1979-1980 0/5
Bruno Bellone 1982 1980-1987 1981-1988 31/34
Manuel Amoros 1982 1980-1989 1982-1992 61/82
Dominique Bijotat 1982 1979-1987 1982-1988 2/8

pour finir...

La rédaction de cet article a nécessité la consultation des sites selectiona.free.fr, L’Équipe, FFF, Wikipédia, Racing Stub, la relecture d’anciens exemplaires de France-Football, L’Équipe et les Cahiers de L’Équipe 1977, 1978, 1979, 1980, ainsi que des ouvrages « L’intégrale de l’équipe de France de football » de Pierre Cazal, Jean-Michel Cazal et Michel Oreggia (First édition, 1998), « Les 1000 joueurs de l’équipe de France » de Jérôme Bergot (Talent Sport, 2021), « Les Bleus éphémères » de Raphael Perry (Hugo Sport, 2021), « Sélectionneur des Bleus » de Pierre Cazal (Mareuil, 2021), « Le Dico des Bleus » de Matthieu Delahais, Bruno Colombari et Alain Dautel (Marabout, 2017-2018-2022), les éditions 1978 à 1982 de « L’année du football » de Jacques Thibert (Calmann-Levy) et du « Livre d’or du football » de Charles Biétry (Solar).

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